Bataille du Berger
Louviers, été 1431
image d'illustration
Jean de Dunois ainsi que la Hire se retrouvent à Louviers pour probablement, supposition, faire libérer Jeanne d'Arc, même si aucun historien pour l'instant ne peut confirmer qu'ils y soient allés pour cette raison. Mais il est étonnant de retrouver ces deux compagnons de Jeanne aussi loin à l'intérieur des terres Normandes. Louviers est un petit village à seulement une journée de cheval de la ville de Rouen. La Bataille du Berger pourrait avoir eu lieu vers la mi-août 1431.
On peut supposer qu'il y a eu une tentative d'obtenir des renseignements et de chercher un moment opportun pour prendre la ville. Il est peu probable par contre que La Hire y soit pour un quelconque marchandage avec les Anglais, n'ayant ni l'habileté politique et étant plutôt un homme d'action militaire. Par contre Dunois, dont on sait la présence également à Louviers, a-t-il tenté de reproduire par la suite le succès plus tardif de Chartres ? On peut remarquer aussi la présence de Gilles de Rais, avec certitude, le 26 décembre 1430 à Louviers.
Décembre 1429, La Hire prends la ville de Louviers aux dépends des Anglais. La ville est à peine 28km de route, donc sept lieues environ soit à peu près 1 journée de cheval.
Jean de Dunois, Bâtard d'Orléans, rejoint La Hire à Louviers. Le 14 mars 1431 il reçoit une quittance de 3000 livres que Charles VII avait ordonné le 12 mars 1431. 2000 Livres devaient amener des « gens d'armes » en la compagnie de Dunois et 1000 Livres pour le Pont de Meulan du côté de Cergy mais proche de Château Gaillard. [ L21- P255 ]
Une nouvelle lettre le 2 avril 1431 ordonne de payer à Dunois 1200 Livres et la quittance est au 20 juin 1431, il est donc toujours à Louviers au moins jusqu'à cette date.
Les Anglais tentent de reprendre la ville le 13 avril 1431, mais ils sont repoussés. [ L20 – P 103 ].
La Hire , ainsi que le maréchal de Boussac, Potton de Xaintraille et quelques autres capitaines, y restent curieusement pendant toute la durée du procès de la pucelle d'Orléans . Mais un fait étrange juste après que Jeanne est brûlée vive, va mettre La Hire dans une mauvaise posture.
C'est Jean Le Fèvre de Saint-Remy, Chroniqueur Bourguignon au service notamment de Phillippe de Bourgogne et seigneur de Saint-Rémy, de la Vacquerie, d'Avesne et de Morienne, qui en fait le récit, dans ces mémoires, sur une période allant de 1407 à 1436.
Voici le texte que j'ai "traduit" en partie dans un français plus courant, non littéral, mais en respectant le plus possible le texte; les parties entre parenthèses sont des explications de texte que j'ai rajoutées, le texte original est [ ici ] :
../..« Or advint après la mort de Jehanne la Pucelle, qu'aucun n'aurait cru sous un fou de berger, qui comme l'avait dit la pucelle Jehanne, disait qu'il avait une révélation divine afin qu'il se mit en armes, pour aider le noble roi de France. Cette folie fut cependant testée mais va faire perdre l'honneur du royaume. Plusieurs notables seigneurs et capitaines eurent confiance en ce Berger, et se mirent en ordre de combat. Quand les Anglais le surent , ils firent un grand rassemblement pour résister et aller à leur rencontre. Du côté français, le maréchal de Boussac ( Jean I de Brosse ), Poton de Xaintrailles, La Hire et plusieurs autres capitaines, en leur compagnie le chef ce méchant Berger. Du côté Anglais , il y avait le comte d'Arondel ( appelé aussi Arundel ) et le seigneur Talbot ( que l'on retrouve à Orléans ) et plusieurs autres : les Français et les Anglais se retrouvent et se battent vaillamment les uns comme les autres. Toutefois la bataille tourne en défaveur des Français ; et là plusieurs furent tués et pris ; le vaillant ( on remarque que le chroniqueur n'est pas avare de compliments sur les sujets du royaume de France, probablement parce que la guerre est finie entre les Bourguignons et les Français et qu'il ne faut fâcher personne) Potton de Xaintrailles , qui est aujourd'hui maréchal de France ( Il devient Maréchal en 1454, ce qui fait que le texte est écrit au plus tôt en 1454 ), y fut pris. Fut pris également le pauvre berger sur lequel espérait tant les Français. Le maréchal de Boussac, La hire et les autres se retirent à Beauvais ; et les Anglais, à grand honneur, triomphe et gloire, s'en retournèrent avec leurs prises et conquêtes. Là fut amené le berger. Ce qu'il devient, je ne sais pas ; mais j'ai entendu dire qu'il avait été jeté dans la seine et noyé. Cette bataille fut appelée la Bataille du Berger »../..
Le berger en question est Guillaume de Mende, ou Guillaume le berger comme l'appelle Enguerran de Monstrelet dans sa chronique. Selon les chroniqueurs, il porterait les stigmates: les mains, pieds et blessures comme Saint-François. « Le journal d'un petit bourgeois de Paris » raconte que le berger est amené à Paris pour le sacre d'Henri VI à Notre Dame de Paris le 16 décembre 1431, il sera humilié et rayé pour finir noyé dans la Seine.
Le texte ne le dit pas mais La Hire est capturé également, on le sait car il est enfermé au donjon de Dourdan pour s'y échapper plus tard.
Charles VII est très probablement le financier de l'intervention militaire, cassant l'abandon supposé par le roi de Jeanne d'Arc, mais curieusement ce fait militaire n'est pas souvent relaté. Je ne sais pas si c'est acté par les chroniqueurs du côté français, il me semble d'ailleurs que la présence des Français à côté de Rouen ne soit en réalité découvert que grâce à ce texte, il peut donc s'agir d'une opération secrète qui a mal tourné, auquel cas il n'y avait pas de volonté d'en faire état. Il ne semble pas que Dunois était à la bataille du Berger, en tout cas aucune trace à ce sujet.
Ce qui laisse également supposer la préparation d'un attaque pour libérer Jeanne , c'est la prise par Ricarville en février 1432 du château de Bouvreuil à Rouen .