Le Château des Carmes : Histoire, Architecture et Héritage

Situé à La Flèche, dans le département de la Sarthe, le Château des Carmes est le plus ancien édifice de la commune. Son histoire riche et mouvementée, depuis ses origines médiévales jusqu'à son rôle actuel de mairie, témoigne des grandes évolutions historiques et architecturales qui ont marqué la région.

Voir aussi : la Bataille de Baugé où les troupes anglaises après leur écrasante défaite s'enfuie en partie par La Flèche en se déguisant en français afin de franchir le gué. 

 

chateau de la fleche carmes

Malgré les apparences les tourelles du château de La Flèche sont des créations récentes , elles reprennent néanmoins le style architecturale des tourelles en encorbellement du XIVe et fin XVe pour les Mâchicoulis.


Histoire

Un donjon médiéval sur le Loir : le premier château de La Flèche (XIe siècle)

Le château des Carmes fut à l'origine une simple forteresse médiévale, érigée au milieu du Loir. Jean de Beaugency, seigneur de La Flèche, choisit cet emplacement stratégique vers 1050 pour construire le premier château de la ville. Composé d’un donjon et d’un pont-levis, il servait à contrôler le passage des bateaux sur la rivière et à percevoir des droits de péage.

De cette époque, il ne reste aujourd’hui qu’un vestige du pont-levis sur l’aile droite du château, représentant environ le tiers de l’édifice initial. Cette forteresse primitive, essentielle à la défense de la ville, joua un rôle important dans les conflits qui secouèrent la région.

helie comte du maine de la fleche beaugency

Élie (ou Hélie) de la Flèche est le fils de Jean de Beaugency, seigneur de La Flèche, qui lui-même était le fils cadet de Lancelin Ier de Beaugency et de Paula du Maine. Grâce à cette dernière, Élie est également le petit-fils d'Herbert Ier Eveille-Chien, comte du Maine. Gravure du XIXe siècle.

 

Les ravages de la guerre de Cent Ans

Durant la guerre de Cent Ans, la forteresse subit plusieurs sièges et passe sous occupation anglaise jusqu’en 1418. La reconstruction du château dans la seconde moitié du XVe siècle par René d’Alençon modernise l’ensemble, mais l’édifice médiéval devient rapidement obsolète face aux exigences de confort de la Renaissance.

À quelques lieues de La Flèche, les troupes anglaises sont écrasées par les forces franco-écossaises lors de la bataille de Baugé. Certains soldats anglais tentent alors de s’échapper en traversant le gué de La Flèche, arborant des croix blanches pour se faire passer pour des Français.

 

En 1537, elle appartient à Françoise d’Alençon, grand-mère d’Henri IV. Désireuse de s’installer à La Flèche mais constatant l’état de délabrement du vieux château, elle fait bâtir une nouvelle demeure, appelée « Château-Neuf », qui deviendra plus tard le Collège des Jésuites, puis le prestigieux Prytanée national militaire.


Le couvent des Carmes : une renaissance religieuse (XVIIe siècle)

En 1620, alors qu’il traverse La Flèche pour réprimer la rébellion de sa mère Marie de Médicis, Louis XIII séjourne dans le château en ruine. Il décide d’en faire don à la communauté des Pères Carmes avec pour mission de le relever et d’y établir un monastère. En 1640, les Carmes prennent officiellement possession des lieux et entreprennent de profonds travaux de transformation.

Ils démolissent les anciennes murailles, ne conservant que le donjon médiéval, et érigent à sa place un couvent. Le pont sur le Loir, rebaptisé « Pont des Carmes », témoigne encore aujourd’hui de cette période monastique. Grâce aux dons et revenus dont ils bénéficient, les religieux transforment l’édifice en une demeure élégante, avec des jardins, un cloître et une chapelle.

Les Carmes restent propriétaires du château jusqu’à la Révolution française, lorsque le domaine est saisi et vendu comme bien national. L’acquéreur, François-René Bertron, un négociant originaire de Fougeré, conserve l’édifice dans sa famille pendant 112 ans. Sous leur propriété, le château devient une demeure bourgeoise dotée d’un parc et subit plusieurs transformations, notamment l’ajout, en 1880, de deux tourelles néo-classiques sur la façade donnant sur le Loir.

 

gravure chateau des carmes la fleche XIXe

Le chateau dit des Carmes au XIXe siècle, on peut voir que l'aspect de la tour est bien différente. Il s'agissait probablement d'une tour porche "piéton".


La mairie et les incendies du XXe siècle

En 1909, la municipalité de La Flèche rachète le château des Carmes pour y établir l’hôtel de ville. Cependant, en 1919, un violent incendie ravage l’édifice, ne laissant debout que la tour du XVe siècle en bordure du Loir. La restauration est longue et coûteuse. Une reconstruction partielle est finalement achevée en 1928. Si certains éléments, comme le cloître d’eau et l’ancienne chapelle, sont réaffectés (la chapelle devient une salle des fêtes), la mairie s’installe durablement dans le château.

Construction moderne qui dénature le site en créant un "bunker" arrondis sur les bords de Loir.

À la fin du XXe siècle, un projet d’extension moderne est lancé sous le mandat du maire socialiste Guy-Michel Chauveau. Ce projet aboutit à la construction d’un bâtiment contemporain, conçu par les architectes Philippe Bodinier, Roland Korenbaum et Adrien Fainsilber.

Le corps principal et le cloître remontent à cette époque. Devenu trop exigu pour accueillir tous les services municipaux, le site nécessite une extension. Le projet porte ainsi sur l’ajout de 1800 m² aux 1000 m² existants, une mission délicate en raison du caractère historique et naturel du site. Château, vestiges du cloître, pavillon et chapelle forment déjà un ensemble à forte identité visuelle. Le permis de construire est déposé le 11 juillet 1991, les travaux débutent en février 1993, et les nouveaux locaux sont inaugurés le 2 mai 1994.

Description architecturale

Le nouvel hôtel de ville se présente sous la forme d’un bâtiment élancé et fin, qui clôt l’espace du côté de la place, renforçant ainsi sa densité et sa cohérence. Côté rivière, il suit une courbe, épousant la berge et évoquant la silhouette d’un navire amarré. Implanté à cheval sur la terre ferme et le fond fluvial, le bâtiment délimite les espaces construits et constitue l’arrière-plan du jardin, devenant l’un des nouveaux points d’accès.

La salle du Conseil municipal
La salle du conseil adopte un plan en quart de cercle, inspiré par la forme ronde de la table de réunion. Alors que le bâtiment administratif se caractérise par sa légèreté, sa transparence et son ouverture, la salle du conseil se distingue par sa solidité et sa forme protectrice en conque, lui conférant une impression de robustesse. Sa configuration reflète la confidentialité des réunions qui s’y déroulent, l’espace intérieur restant discret et inaccessible au regard des passants.

Cependant, cette initiative suscite une vive contestation au sein de la population, qui déplore une altération de l’harmonie architecturale du site historique. Malgré les critiques, l’extension est achevée en 1994, ajoutant de nouveaux locaux destinés à accueillir les bureaux municipaux et à répondre aux besoins administratifs croissants de la commune.

L’hôtel de ville de La Flèche a été officiellement distingué par le label « Architecture contemporaine remarquable » lors d’une cérémonie d’inauguration qui s’est tenue le mercredi 10 avril 2024, en présence des représentants des collectivités locales et de l’État. Bien que l’aspect architectural du bâtiment ait suscité des débats à l’époque de sa construction et encore aujourd'hui, cette reconnaissance patrimoniale qui n'a en réalité que peu de valeur puisque attribué par la préfecture et n'ayant aucun caractère contraignant. 

Il suffit de voir la liste des monuments pour se poser des questions sur la légitimité de ce label :  Béton de la Sarthe et POP culture

"L’objectif poursuivi est de montrer l’intérêt de constructions récentes que tout un chacun peut habiter et fréquenter, de faire le lien entre le patrimoine ancien et la production architecturale actuelle, d’inciter à leur réutilisation en les adaptant aux attentes du citoyen (écologique, mémorielle, sociétale, économique…)."  vient aujourd’hui valider les choix politiques en dépit des contestations. « L’attribution de ce label confirme la vision des responsables de l’époque », a souligné  la socialiste Nadine Grelet-Certenais.

En réalité ce label ,qui n'a aucun caractère contraignant, est surtout un outil de communication.

 


Architecture : entre héritage médiéval et modernité

Notons que les images de Lorent Deutsch ne montrent quasiment pas le massacre architecturale ..du projet de 1991.

Le château des Carmes occupe une position stratégique, niché dans un méandre du Loir et réparti sur deux îlots reliés par des canaux. Cette situation, héritée de son passé de forteresse aquatique, confère à l’édifice une allure unique.

Vestiges historiques et transformations successives

  • Le donjon du XVe siècle : Dernier vestige majeur de la forteresse médiévale, cette tour est l’un des éléments emblématiques du château. Elle présente deux étages carrés et un étage de combles.

  • Le pont-levis médiéval : Bien que partiellement détruit, un pignon du pont-levis d’origine subsiste encore sur l’aile droite du château, témoignant des anciennes fortifications.

  • Les tourelles néo-classiques : Ajoutées en 1880, elles apportent une touche élégante à la façade côté rivière.

  • Le corps principal du logis : Construit à l’époque des Pères Carmes, il présente un étage carré et un étage de combles, avec des ouvertures symétriques typiques des bâtiments conventuels.

  • La chapelle et le cloître d’eau : La chapelle, devenue salle des fêtes après la Reconstruction, est séparée du reste des bâtiments par un cloître d’eau, une structure déambulatoire autour d’un canal.

  • L’extension contemporaine : En 1994, des locaux modernes sont ajoutés pour compléter l’ensemble architectural et répondre aux besoins de la mairie.


Un patrimoine vivant

Le château des Carmes, témoin de près de dix siècles d’histoire, demeure un lieu emblématique de La Flèche. À la fois hôtel de ville, espace culturel et site historique, il accueille aujourd’hui des expositions, des mariages, des réceptions et des réunions. Ce mélange d’ancien et de moderne reflète l’identité de La Flèche, entre tradition et modernité.


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