Guillaume le Conquérant
Guillaume le Conquérant, également connu sous le nom de Guillaume le Bâtard, est né à Falaise en 1027 ou 1028. Il est le fils illégitime du duc de Normandie, Robert le Magnifique, et d'Arlette, une fille de tanneur. Guillaume a grandi dans un environnement difficile, mais il a réussi à devenir l'un des plus grands conquérants de l'histoire.
Le château de Falaise, au centre le donjon et sur la gauche la tour Talbot. Sur la droite se trouve l'entrée "moderne", qui fut pendant quelques années très longtemps décriée.
Guillaume devient duc de Normandie à la mort de son père, vers l'âge de huit ans. Après une période de forte instabilité, il parvient à reprendre la domination du duché à partir de la bataille du Val-ès-Dunes, en 1047. Il épouse Mathilde de Flandre vers 1050, et fait de la Normandie un duché puissant, craint des rois de France Henri Ier (1031-1060) puis Philippe Ier (1060-1108). À la suite de la mort du roi Édouard le Confesseur, il profite d'une crise de succession pour s’emparer, après sa victoire à la bataille d'Hastings (1066), de la couronne d’Angleterre. Cette conquête fait de lui l’un des plus puissants monarques de l’Europe occidentale et conduit à de très profonds changements dans la société anglaise, dont l'élite anglo-saxonne qui disparaît au profit des Normands. Il est inhumé à l'Abbaye aux Hommes de Caen
Guillaume le Conquérant est mort à Rouen le 9 septembre 1087, après la mise à sac de Mantes, au cours d'une campagne de représailles dans le Vexin français contre le roi Philippe Ier.
Guillaume le Conquérant, interprétation d'artiste au XIXe siècle.
La rencontre de ses parents
Vers 1027-1028 (?), un événement marquant se produit : le songe d'Arlette et la naissance de Guillaume.
À un jeune âge, Robert "le Magnifique" devient le sixième duc de Normandie, succédant ainsi à Richard III. Le duc Robert se rend régulièrement à Falaise, où il séjourne à plusieurs reprises. C'est là qu'il rencontre une jeune femme nommée Arlette, fille d'un bourgeois, qui est encore très jeune et vierge. Il est charmé par sa beauté et son charme, et Arlette se laisse séduire par le jeune prince, devenant ainsi sa compagne, sa "frilla".
Quelque temps plus tard...
Après avoir passé de longues heures éveillées ensemble [...], Arlette s'endort près du duc. Ce noble seigneur s'allonge à ses côtés et attend. Après un certain temps, suite à une vision qu'elle a en rêve, elle pousse un cri et se réveille en sursaut. "Seigneur", dit-elle, "je ne sais pas si c'était un simple rêve que j'ai fait. J'ai rêvé qu'un arbre sortait de mon corps et grandissait jusqu'au ciel, projetant son ombre sur toute la Normandie". Le duc répond : "Que cela soit, s'il plaît à Dieu". Il la réconforte et la rapproche de lui. De cette charmante Arlette naît un fils qui est appelé Guillaume.
Selon la légende c'est devant cette fontaine que le duc de Normandie, Robert le Magnifique, rencontra la belle Arlette future mère de Guillaume le Conquérant.
Ces informations sont tirées du "Roman de Rou" de Robert Wace, traduit par J. Lepetit.
Chapitre 1 : La jeunesse de Guillaume
Guillaume a été élevé par sa mère Arlette, qui a travaillé dur pour lui offrir une éducation de qualité. Il a appris à lire et à écrire, ainsi qu'à parler le latin et le français. À l'âge de huit ans, Guillaume a été envoyé vivre chez son oncle, le comte de Flandre, où il a appris l'art de la guerre et a commencé à se forger une réputation de courage et de détermination.
Entre 1035 et 1041, des événements importants marquent l'enfance de Guillaume et son adoubement.
En 1035, Robert décède au retour d'un pèlerinage. Avant son départ, il veille à présenter son fils comme son héritier aux grands personnages du duché. Chacun prête hommage au jeune Guillaume, reconnaissant ainsi sa future position. Après la mort de son père, Guillaume, probablement orphelin à ce moment-là, vit la fin de son enfance sous la protection de sa mère et de ses deux demi-frères, Robert et Odon.
En 1041 ou 1042, alors âgé de seulement quinze ans, Guillaume participe au siège du Château de Falaise, occupé par Turstin, Vicomte d'Hiémois. Turstin fait partie des nombreux seigneurs normands qui refusent l'autorité du jeune duc et de son représentant, Raoul de Gacé. La milice ducale réussit à reprendre le Château, et Turstin se rend.
À cette époque, Guillaume est également adoubé chevalier. Ces deux événements symbolisent la fin de son enfance. Enfin, la joie et l'allégresse éclatent, particulièrement pour ceux qui aspirent à la paix et à la justice. Notre duc est armé chevalier [...]. C'était un spectacle à la fois charmant et redoutable de le voir tenir les rênes, paré de son épée, brillant sous son bouclier, menaçant avec son casque et sa lance. Car s'il était déjà d'une grande beauté vêtu en prince ou en habits pacifiques, les ornements qu'il revêtait pour affronter l'ennemi lui allaient singulièrement bien.
Ces informations sont tirées des "Gesta Guillelmi" de Guillaume de Poitiers, traduites par R. Forcvillc.
Tentative d'Assassinat
Les vicomtes du Bessin et du Cotentin font partie des barons rebelles. En 1046, ces barons complotent l'assassinat de Guillaume alors qu'il se trouve dans la région de Valognes, où il est venu chasser. Alors qu'il est profondément endormi, son fou, Goles, le réveille en criant. Il a surpris les préparatifs du complot. Guillaume s'échappe à cheval, cherchant à rejoindre son château de Falaise, mais méfiant envers le vicomte de Bayeux. Il décide donc de faire un détour qui le mène vers la baie des Veys. Au lever du soleil, il atteint le château de Ryes où il est accueilli par le seigneur du lieu, Hubert.
Hubert de Ryes observe Guillaume presque sans armes et son cheval épuisé. Il lui demande dans quel état il voyage. Guillaume répond : "Mes ennemis me recherchent et ils menacent de me tuer". Avec Hubert, il n'a rien à cacher. Hubert le conduit dans son château et parvient à faire amener son bon cheval. Il appelle également ses trois fils et leur demande de monter à cheval. Il leur donne pour mission d'escorter Guillaume jusqu'à Falaise en évitant les routes principales et en évitant de se diriger vers une ville.
Hubert donne des indications précises sur l'itinéraire à suivre et les détours à prendre. Ses fils comprennent rapidement les instructions et les suivent à la lettre. Ils traversent le pays et passent près du Mont de Four pendant leur voyage. Finalement, ils parviennent à faire entrer Guillaume à Falaise. Dès qu'il y arrive, que quiconque soit maudit s'il en est contrarié !
Ces informations sont tirées du "Roman de Rou" de Robert Wace, traduites par J. Lepetit.
La bataille de Val Es Dunes
La bataille de Val Es Dunes marque le véritable début du règne de Guillaume I selon les historiens. C'est une grande victoire contre les vassaux rebelles, dirigés par Gui de Brionne, fils du duc de Bourgogne. Gui refuse de reconnaître la légitimité de Guillaume en prétextant qu'il est un bâtard. Il organise donc une rébellion dans l'espoir de prendre le contrôle du duché, obtenant le soutien de certains grands seigneurs normands, dont Hamon le Dentu, Raoul II Taisson, et les vicomtes du Bessin et du Cotentin, responsables du complot de Valognes. Le conflit éclate entre les conspirateurs et les fidèles de Guillaume, et le roi de France, Henri Ier, soutient le jeune duc et combat à ses côtés avec ses hommes.
La bataille se déroule à quelques kilomètres au sud-est de Caen, près de l'Orne. On estime que Gui a rassemblé environ mille hommes, tandis que l'armée formée par le roi et le duc est d'une taille similaire. De loin, on pouvait voir les escadrons et les chefs se déployer à travers les vastes plaines. Chaque homme, qu'il soit paysan ou baron, était près de son étendard, guidant sa suite. Les blasons et les armoiries étaient visibles, peints sur des écus et des bannières.
Le champ de bataille était animé, avec des chevaux galopant en avant, des lances levées, des boucliers étincelants et des hommes revêtus d'armures brillantes. Les guerriers poussaient des cris de guerre tout en chargeant leurs adversaires. Lorsque les deux armées se sont rencontrées, un fracas assourdissant a retenti, faisant trembler la terre. On aurait pu voir les chevaliers encourager leurs montures, certains faisant demi-tour, d'autres affrontant l'ennemi de front...
Ces informations sont tirées du "Roman de Rou" de Robert Wace, traduites par René Louis.
Bataille de Varaville
En 1057, la bataille de Varaville marque une victoire décisive de Guillaume sur le roi de France, Henri Ier. Bien que Guillaume et Henri Ier aient conclu un accord, leur rivalité est bien réelle et les sources de conflits sont nombreuses. Les alliés d'Henri Ier, tels que Geoffroy de Mayenne, Geoffroi Martel, comte d'Anjou, Guy-Guillaume Duc d'Aquitaine et Eon de Porhoüet, comte de Penthièvre, assiègent Guillaume au château d'Ambrières.
Cependant, le bâtard réagit rapidement et force les assaillants à lever le siège. Geoffroy de Mayenne est capturé. Ulcéré par la puissance de ce vassal, le roi se lance alors dans une campagne contre la Normandie, forçant Guillaume à se replier à Falaise. Guillaume attend patiemment que ses ennemis repartent vers l'est, puis il lance son attaque à quelques kilomètres du pont de Varaville, sur la Dives. Bien que ses troupes soient moins nombreuses que celles de ses ennemis, il utilise une ruse astucieuse.
Lorsque les troupes franco-angevines traversent le pont, la marée monte subitement, piégeant la moitié de leur armée. C'est à ce moment que Guillaume attaque l'autre moitié. Ses ennemis se précipitent sur le pont, qui finit par s'effondrer. Pris au piège en deçà du fleuve, sous les yeux du roi, la plupart des soldats ennemis succombent aux coups de glaive, à l'exception de ceux qui, terrifiés, choisissent de se jeter dans les eaux.
Cette bataille, relatée par Guillaume de Poitiers dans ses "Gesta Guillelmi", marque un revers terrible pour Henri Ier et Geoffroi Martel. Rempli de colère et de douleur, le roi de France quitte les lieux sans porter ni bouclier ni lance, et ne mettra plus jamais les pieds en Normandie.
Ces informations sont issues du "Roman de Rou" de Robert Wace, traduites par J. Lepetit.
Chapitre 2 : La conquête de l'Angleterre
Les bateaux de l'invasion par Guillaume le Conquérant, l'analogie avec les navires Vikings est assez évidente.
En 1066, Guillaume a entrepris la conquête de l'Angleterre. Il a rassemblé une armée de plus de 7 000 hommes, il part du port de Saint-Valery sur Somme et a débarqué à Pevensey, dans le Sussex. Le 14 octobre 1066, il a remporté la bataille d'Hastings, au cours de laquelle le roi Harold a été tué. Guillaume a ensuite été couronné roi d'Angleterre à Westminster Abbey le jour de Noël de la même année.
Départ de Normandie
En septembre 1066, la traversée vers l'Angleterre se fait le 28 septembre, non pas depuis Dives mais depuis Saint-Valéry-sur-Somme, car les vents du nord-est empêchent le départ des navires. Le duc, soucieux d'interdire tout pillage, prend en charge la subsistance de cinquante mille chevaliers (le chiffre réel étant d'environ 7000) pendant un mois, alors que des vents contraires les retiennent à l'embouchure de la Dives. Cette attitude témoigne de la modération et de la sagesse du duc : il pourvoit généreusement aux dépenses de ses chevaliers et de ses hôtes, et personne n'est autorisé à voler le moindre objet. Les troupeaux de bœufs et de moutons des habitants locaux paissent en toute sécurité.
Lorsqu'enfin les vents deviennent favorables, la traversée est si rapide que le sol anglais risque d'être atteint trop tôt. Le duc ordonne alors une halte en plein milieu de la mer. Enfin, la brise tant attendue se lève. Les hommes, de leur voix et de leurs mains, expriment leur gratitude au ciel et poussent une grande clameur pour s'encourager mutuellement...
Cependant, Guillaume craint que s'ils atteignent les côtes avant l'aube, ils ne courent un danger en s'ancrant dans un lieu inconnu et potentiellement hostile. Il ordonne donc, par le biais de son héraut, de faire une courte escale nocturne une fois qu'ils seront en haute mer. Tous les navires restent ancrés à proximité du sien, jusqu'à ce qu'ils aperçoivent un feu allumé au sommet de son mât et entendent le son de la trompette, qui signalera le moment de reprendre la course.
Ces récits sont tirés des "Gesta Guillelmi" de Guillaume de Poitiers, traduits par Pierre Bouet et R. Foreville.
La conquête
La conquête de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant est l'un des événements les plus importants de l'histoire britannique. Elle a eu lieu en 1066, lorsque Guillaume, duc de Normandie, a réussi à envahir l'Angleterre et à renverser Harold II, le roi d'Angleterre. Cette conquête a marqué le début de la dynastie des rois normands en Angleterre et a eu des répercussions durables sur l'histoire du pays.
Pour comprendre les raisons de cette conquête, il est essentiel de revenir en arrière. À l'époque, l'Angleterre était une nation relativement jeune, formée par l'unification des royaumes anglo-saxons. Guillaume le Conquérant, quant à lui, était le descendant de Vikings qui s'étaient installés en Normandie, dans le nord de la France. Il prétendait avoir un droit légitime au trône d'Angleterre, car il affirmait que le défunt roi d'Angleterre, Édouard le Confesseur, lui avait promis la couronne.
En 1066, Harold II monta sur le trône d'Angleterre après la mort d'Édouard le Confesseur. Cependant, Guillaume le Conquérant considérait cela comme une usurpation de pouvoir et décida de préparer une expédition pour revendiquer son droit au trône. Il rassembla une armée de nobles normands, de chevaliers et de mercenaires venant de toute l'Europe.
Le 28 septembre 1066, Guillaume et son armée débarquèrent sur les côtes du Sussex, dans le sud de l'Angleterre. Ils furent rapidement confrontés à Harold II et à son armée anglo-saxonne à la bataille de Hastings, le 14 octobre 1066. La bataille fut féroce, mais finalement, les forces de Guillaume l'emportèrent et Harold II trouva la mort sur le champ de bataille.
Après sa victoire à Hastings, Guillaume le Conquérant marcha vers Londres, où il fut couronné roi d'Angleterre le jour de Noël de la même année. Cependant, la conquête de l'Angleterre était loin d'être terminée. Guillaume dut faire face à plusieurs rébellions et tentatives de restauration du pouvoir anglo-saxon. Il réprima ces révoltes avec une grande brutalité et établit un contrôle ferme sur le pays.
Guillaume entreprit également de consolider son pouvoir en confisquant les terres des nobles anglo-saxons et en les redistribuant à ses partisans normands. Ce processus, connu sous le nom de « Domesday Book », permit à Guillaume de mieux connaître les richesses et les ressources de son nouveau royaume.
L'impact de la conquête normande sur l'Angleterre fut profond. Elle marqua le début d'une nouvelle ère, connue sous le nom de l'ère normande, qui dura près de trois siècles. Les rois normands, y compris les successeurs de Guillaume, introduisirent des changements majeurs dans la société et le système politique anglais.
Le système féodal, dans lequel les terres étaient accordées en échange de services militaires, devint la norme en Angleterre sous les rois normands. Le français devint la langue de la cour et de l'élite, tandis que l'anglo-saxon était parlé par la population en général. Cette fusion des cultures normande et anglo-saxonne donna naissance à l'anglo-normand, une forme de la langue anglaise qui influença considérablement le développement ultérieur de la langue.
En plus des changements linguistiques et sociaux, la conquête normande eut également un impact significatif sur l'architecture et les institutions en Angleterre. Les châteaux normands, tels que la Tour de Londres, furent construits pour affirmer le pouvoir des nouveaux dirigeants et servir de symboles de leur domination.
En fin de compte, la conquête de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant a été un événement déterminant dans l'histoire du pays. Elle a établi une nouvelle dynastie, influencé le développement de la langue et de la culture anglaises, et apporté des changements politiques et sociaux durables. Même aujourd'hui, presque un millénaire plus tard, les conséquences de cette conquête sont encore visibles dans la société et le système politique britanniques.
Chapitre 3 : Le règne de Guillaume
Entrée du château de Falaise.
Le règne de Guillaume a été marqué par des conflits avec les barons anglais et les rois de France. Il a construit des châteaux pour maintenir le contrôle sur les terres conquises et a introduit des réformes administratives pour renforcer le pouvoir royal. Il a également encouragé la construction de cathédrales et d'abbayes, dont la célèbre Abbaye de Westminster.
Le règne de Guillaume le Conquérant en Angleterre est l'une des périodes les plus marquantes de l'histoire britannique. Après sa victoire décisive à la bataille de Hastings en 1066, Guillaume a consolidé son pouvoir et a entrepris de transformer l'Angleterre en un royaume normand prospère et centralisé.
Dès le début de son règne, Guillaume a dû faire face à plusieurs défis. Il devait consolider son autorité sur le pays, récompenser ses partisans normands et établir un système politique et juridique solide. Pour y parvenir, il a pris plusieurs mesures importantes.
Tout d'abord, Guillaume a confisqué les terres des nobles anglo-saxons qui avaient soutenu Harold II lors de la bataille de Hastings. Ces terres ont été redistribuées à ses partisans normands, ce qui a renforcé leur loyauté envers le roi et a créé une classe dirigeante normande en Angleterre. Cette politique a suscité de l'animosité parmi la population anglo-saxonne, qui s'est sentie marginalisée et opprimée.
En outre, Guillaume a mis en place le célèbre « Domesday Book », un recensement détaillé de toutes les terres, propriétés et ressources du royaume. Ce document lui a permis d'établir un contrôle étroit sur le pays et de connaître les richesses disponibles. Il a également facilité la collecte de taxes et a renforcé l'autorité royale.
En 1086, vingt ans après le début de la Conquête, Guillaume entreprend en Angleterre un recensement d'une ampleur exceptionnelle : le livre qui enregistre ses résultats est connu sous le nom de "Domesday Book".
L'objectif est de réaliser un inventaire détaillé de l'ensemble des terres royales, y compris un relevé exhaustif des biens fonciers, en précisant le nombre d'habitants, la superficie, la nature des terres et les services qui y sont associés...
Pour mener à bien cette enquête, le roi fait appel aux shérifs, ses représentants locaux. De village en abbaye, de ferme en moulin, ses serviteurs parcourent ainsi plus de la moitié du royaume. Les premières informations recueillies sont ensuite vérifiées et complétées par des jurys composés d'Anglo-Saxons et de Normands, présidés par des nobles et des ecclésiastiques. Au fur et à mesure de leur progression, ces assemblées convoquent tous les hommes libres pour les interroger. Les enquêteurs se renseignent également sur l'état des lieux à l'époque du roi Édouard et sur les changements survenus au cours des vingt dernières années.
"Cette enquête fut menée avec tant de rigueur qu'aucun hide, aucun morceau de terre, aucun bœuf, aucune vache ni aucun porc ne fut oublié..."
Ces informations sont tirées de l'ouvrage "Guillaume le Conquérant" de Michel de Boüard, édition Fayard (1984), basé sur la Chronique anglo-saxonne (version E).
Guillaume a également introduit des réformes juridiques pour unifier le système de justice en Angleterre. Il a créé un système de tribunaux royaux, qui étaient itinérants et suivaient le roi lors de ses déplacements à travers le pays. Ces tribunaux ont assuré l'application de la loi et la résolution des conflits, et ils ont renforcé l'autorité centrale du roi.
En plus des réformes politiques et juridiques, Guillaume a joué un rôle important dans l'évolution culturelle de l'Angleterre. Il a encouragé le mélange des cultures normande et anglo-saxonne, ce qui a donné naissance à l'anglo-normand, une forme de la langue anglaise influencée par le français. Le français est devenu la langue de la cour et de l'élite, tandis que l'anglo-saxon était parlé par la population en général. Cette fusion des cultures a influencé le développement ultérieur de la langue et de la culture anglaises.
Une autre facette importante du règne de Guillaume a été sa relation avec l'Église. En tant que duc de Normandie, Guillaume avait déjà établi de bonnes relations avec le pape et l'Église catholique. Après sa conquête de l'Angleterre, il a cherché à renforcer le pouvoir de l'Église et à s'assurer de son soutien. Il a nommé des évêques normands à des postes clés et a renforcé le contrôle de l'Église sur les terres et les revenus. Cela a également eu pour effet de lier l'Église à la couronne, renforçant ainsi l'autorité royale.
Néanmoins, le règne de Guillaume n'a pas été sans opposition. Il a dû faire face à plusieurs rébellions, dont la plus célèbre a été la révolte des comtes du nord en 1069. Cette rébellion, dirigée par des nobles anglo-saxons mécontents et soutenue par les royaumes voisins, a été une tentative de renverser le règne normand. Guillaume a réprimé la rébellion avec une grande violence, dévastant le nord de l'Angleterre et exerçant une répression impitoyable. Ces mesures brutales ont contribué à renforcer le pouvoir royal et à dissuader toute autre opposition.
En plus des rébellions internes, Guillaume a également dû faire face à des menaces externes. Il a repoussé les invasions des Gallois et des Écossais, consolidant ainsi les frontières de son royaume. Il a également renforcé les liens avec le continent, notamment avec la Normandie, en établissant des mariages stratégiques et en favorisant les échanges commerciaux.
Au-delà de ses efforts politiques et militaires, Guillaume a laissé un héritage architectural durable en Angleterre. Il a ordonné la construction de nombreux châteaux et cathédrales normands, dont la Tour de Londres et la cathédrale de Durham, qui témoignent encore aujourd'hui de son règne et de son influence.
Le règne de Guillaume le Conquérant a été marqué par une centralisation du pouvoir, des réformes politiques et juridiques, une fusion des cultures normande et anglo-saxonne, et une consolidation du contrôle royal sur l'Angleterre. Son règne a jeté les bases de la dynastie des Plantagenêts et a influencé de manière significative l'histoire et le développement ultérieur de l'Angleterre.
Chapitre 4 : La mort de Guillaume
Guillaume est mort le 9 septembre 1087, à Rouen, en Normandie. Il a été enterré dans l'abbaye de Saint-Étienne à Caen, qu'il avait fondée. Son fils aîné, Robert, a hérité du duché de Normandie, tandis que son deuxième fils, Guillaume le Roux, a succédé à son père sur le trône d'Angleterre.
En novembre 1083, Mathilde décède. Le roi, quant à lui, vieillit et il est dit qu'il devient obèse. Il est accablé par de lourdes préoccupations, notamment le conflit qui l'oppose au roi de France, Philippe Ier, auquel son fils aîné, Robert, s'est rallié. Il décide de se rendre dans le Vexin, une région à cheval entre la Normandie et la France, qui est le cœur du conflit. Pendant l'été 1087, il prend possession de Mantes. La campagne est brève et efficace, mais sur le chemin du retour, il se blesse. Après avoir été soigné à Rouen, ses forces diminuent rapidement et il demande à être transporté hors des murs, au prieuré de Saint-Gervais. C'est là qu'il décède le 9 septembre 1087.
Sachant que sa santé se détériore de manière alarmante, Guillaume réalise que la mort est imminente. Il appelle auprès de lui ses fils, Guillaume le Roux et Henri, qui sont présents, ainsi que quelques-uns de ses amis. Avec prévoyance et sagesse, il s'occupe des affaires de son royaume. Son fils aîné, Robert, avec qui il avait eu de vifs désaccords par le passé, s'était récemment fâché à cause de quelques folies et s'était retiré auprès du roi de France.
Le sage héros ne tarde pas à s'assurer, non seulement pour lui-même mais aussi pour beaucoup d'autres, de grands avantages pour l'avenir. En conséquence, il fait distribuer ses trésors aux églises, aux pauvres et aux ministères de Dieu. Avec sagesse, il règle et fait écrire en sa présence, par les notaires, les dons qu'il souhaite accorder à chacun.
Ces informations sont tirées de l'"Historia ecclesiastica" d'Orderic Vital, traduite par G. Guizot.
Chapitre 5 : L'héritage de Guillaume
Guillaume le Conquérant est considéré comme l'un des plus grands conquérants de l'histoire. Il a laissé un héritage durable en Angleterre, où il a introduit des réformes administratives et a renforcé le pouvoir royal. Il est également connu pour avoir commandé la Tapisserie de Bayeux, une œuvre d'art qui raconte l'histoire de la conquête de l'Angleterre. Aujourd'hui, Guillaume est considéré comme un héros national en Normandie et est célébré chaque année lors de la fête de la Saint-Michel.