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Le film est disponible en DVD à la Fnac
"Jeanne Captive "Ma Critique du Film :
Le film retrace la captivité de Jeanne d'Arc notamment dans le château de Beaurevoir , à Crotoy et Rouen. Mais il élude totalement le procès en finissant cependant par la fin tragique.
Le début du film qui initialement est dans le château de Beaurevoir est tourné en grande partie dans le donjon de Vez pour l'extérieur. Quelques vues ont été tournées au château de Pierrefonds, une partie au donjon de Vincennes mais aussi pour la fin du film lors de son exécution dans les fossés de Provins.
Dès le départ on comprend vite que le film est tourné avec très peu de moyens et un budget serré. Cependant il a eu la possibilité de tourner avec de bons acteurs, même si Matthieu Almaric tient un rôle relativement furtif d'ermite de la forêt ( très courant à l'époque ) mais pas inintéressant. On note la présence de Thierry Frémont et de l'excellent Liam Cunningham qui joue parfaitement bien son rôle dans le film.
Le réalisateur Philippe Ramos a donc pris le parti de faire un film relativement courageux, sans budget et a priori sans soutien particuliers. Peut être pour des raisons politiques, la plupart des sociétés de productions cinématographiques sont clairement à gauche, voir extrême gauche. Financer un film sur Jeanne d'Arc, qui à leurs yeux est la représentante de la droite nationale n'est sûrement pas étranger à ce désert de financement. Il est évident qu'ils préfèrent financer des films étrangers comme "les indigènes" plus à même de rafler des césars qu'un film sur Jeanne d'Arc qui est a contre courant de la pensée actuelle en jetant l'opprobre sur tout ce qui est français en faisant table rase du passé. Les derniers mouvements pour supprimer certains personnages de l'histoire de France dans les écoles et les menaces non voilées envers les Français dits de souche par Nicolas Sarkoy en 2008 à l'école polytechnique [ voir : la vidéo et un texte ] en disent long sur l'état d'esprit de la France d'aujourd'hui.
Si on peut critiquer certains aspects de la reconstitution de l'époque, avec notamment des dialogues modernes, des coupes de cheveux également dans l'air de notre temps et des pièces avec fenêtres, ça ne change pas grand-chose en réalité à la physionomie du film. En effet sauf au début où il y a un petit choc, la suite est plus proche de la réalité en terme vestimentaire notamment .
Cependant , mon reproche sur certains aspects sont les suivants : lors de son saut de la tour de Beaurevoir le réalisateur, laisse supposer qu'elle tente de se suicider. Cet état de fait ne semble pas correspondre à la réalité comme on peut le voir dans le procès. Certes ces accusateurs ont cherché tant bien que mal à la faire avouer d'une tentative de suicide, mais il semble en toute objectivité qu'il s'agissait pour Jeanne plutôt de s'échapper. Par ailleurs les témoignages de l'époque semblent accréditer qu'elle ait cherché à s'évader en nouant des draps et autres tapisseries, mais lors de sa descente l'ensemble de son cordage aurait cédé. Au vu de la hauteur manifeste sa mort aurait été probable si elle avait sautée directement de la fenêtre qui était au minimum à plus 15 mètres à 20 mètres de hauteur du sol. On peut cependant parler de miracle au sujet de sa survie. Jeanne était une battante , son caractère trempé et sa foi en dieu ne lui auraient sûrement pas permis de faire un acte qualifié d'hérétique aux yeux de la religion, se suicider est pire qu'un pêché ! Pour autant les jours où elle ne parlera pas, dû à sa chute , sont bien mis en valeur et plutôt bien interprété par Clémence Poésy, par contre malgré le scénario du film elle entendait bien encore des voix à cette époque ( travers de Luc Besson ?? )...
Ce qui est dommage aussi c'est que Philippe Ramos a totalement éclipsé le rôle des trois Jeannes , parents de Jean Luxembourg, qui auront eu un rôle important. Il aurait donc pu apporter une approche donc plus féminine et plus dans la réalité historique d'un hypothétique médecin ( joué par Frémonts ) qui tente presque de la sauver voir de la libérer.
Ce qui est dommage également c'est que Philippe Ramos n'a pas cherché à faire un film basé sur des faits historiques toujours probants, il brode les dialogues et les réactions des acteurs. Ce qui est gênant en définitive c'est l'approximation du caractère de Jeanne d'Arc et sur ce point Clémence Poésy est pour ma part à plusieurs reprises hors sujet. Elle joue parfaitement la battante et le caractère trempé de Jeanne comme dit précédemment, mais sur le côté religieux, son innocence, son charme, sa lutte et sa résistance est un peu passé à la trappe. Scénario léger ou actrice un peu perdue qui n'a pas appronfondi qui était Jeanne ?
Pourquoi avoir éluder totalement le procès ? cela n'aurait pas demandé un lourd budget et si on entre bien dans le caractère de Jeanne c'est bien à ce moment là. On y voit sa résistance morale, sa lutte pour sa survie tout en ne renonçant à aucune de ses convictions. D'autant que le réalisateur utilise en partie son abjuration comme thème central non seulement dans la bande-annonce, mais aussi dans la fin du film, sans chercher ou démontrer quoi que ce soit. Dommage , il a manqué là un sujet qui aurait parfaitement correspondu à son film.
Le problème donc du film se joue en partie dans cette opposition entre un film de fiction et la réalité, tous ces éléments s'entrechoquent sans donner forcément de cohérence au film. Probablement qu'il aurait du choisir un film tel qu'il est, mais avec un plus grand soucis de s'attacher à ce qu'on connaît de Jeanne et non pas à la Luc Besson d'inventer des scénarios ou des situations.
Pour autant la Jeanne de Philippe Ramos sur la captivité est sûrement plus proche de la réalité, surtout si on le compare au film de Luc Besson qui pour le coup nous a joué un coup de Trafalgar. En effet la qualité de ce film est quand même d'avoir une certaine homogénéité de Jeanne, de ne pas tomber dans l'excès , alors que Luc Besson a clairement passé ,à partir du moment qu'elle est capturée à Compiègne, pour une folle dérangée tiraillée entre Dieu et le diable, ce qui clairement n'était pas dans le caractère de Jeanne. Luc Besson a totalement fourvoyé Jeanne d'Arc et d'une certaine manière ne lui rends pas hommage. Il a fini par faire un film qui est à la limite de l'insulte et du mensonge historique. Philippe Ramos a aucun moment , sauf peut être sur cette partie un peu limite du suicide, ne l'insulte ou la dénature totalement, il la respecte avec profondeur et une touchante attention.
L'autre point que j'ai beaucoup aimé de ce film c'est l'aspect parfois psychologique de la captivité, la solitude, la volonté des Anglais de l'humilier , de la soumettre voir de la corrompre, et tout cela sans jamais tomber dans le pathologique. Il a parfaitement aussi montré parfois l'ambivalence, la perplexité et la curiosité des Bourguignons et des Anglais envers cette Jeanne si énigmatique et vivante.
Pour conclure je conseille cependant à toute personne s'intéressant à Jeanne d'Arc d'allez voir le film. En n’oubliant jamais que c'est un film à petit budget, risqué financièrement et qu'il y a donc des imperfections. Mais si je devais comparer cette Jeanne à celle de Luc Besson, je préfère très largement celle de Philippe Ramos qui la respecte et lui donne une certaine hauteur.
Rappelons d'ailleurs qu'un film reste un film , qu'il est l'oeuvre d'une interprétation personnelle du réalisateur, que ça soit Luc Besson ou Philippe Ramos, il ne faut donc jamais prendre pour argent comptant un film dit historique ou basée sur une histoire vraie.
Les cinémas qui ont le courage de projeter le film à Paris et sa région sont :
{youtube}BnJ0I7-IWqU{/youtube}
Interview de Florence Poésy au sujet du film
{youtube}XrVKkepo2aE{/youtube}
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( il ne s'agit pas de la série mais bien du film )
En 1215, le roi d'Angleterre, Jean, a été contraint de signer la Magna Carta, un document qui assure la liberté du peuple et constitue désormais la base du droit commun en Angleterre. Furieux d'y avoir été forcé, il lève une armée de mercenaires et commence à piller le pays pour reprendre le pouvoir. Il est sur le point d'atteindre Londres et de remporter la victoire, mais un dernier obstacle se dresse encore sur sa route : le château de Rochester. À l'intérieur, rassemblée par le baron Albany, une petite bande de guerriers rebelles s'est jurée de retenir le roi Jean jusqu'à l'arrivée des renforts. Elle compte un chevalier Templier ; Isabel, la dame du château, mais aussi des mercenaires endurcis comme Beckett et des jeunes soldats tels Guy, qui va goûter à la bataille pour la première fois – et peut-être bien la dernière. Chacun a ses espoirs, ses démons et ses secrets. De part et d'autre de la muraille, les deux camps sont prêts à tout pour l'emporter et l'heure de l'affrontement approche...
Ma petite critique :
On parle ici de Jean sans Terre, qui va devoir signer le magna carta ( voir ici ), traité plus tard bafoué . Il s'agit d'un traité entre les barons en rébellion ouverte et Jean sans Terre, accusé d'avoir non seulement perdu un nombre important de batailles face à Philippe Auguste mais aussi de taxer la population de manière abusive. Mais le traité apportera aussi d'autres demandes, il garantit notamment le droit à la liberté individuelle et limite l'arbitraire royal et établit en droit l'habeas corpus qui empêche, entre autres, l'emprisonnement arbitraire. Un rapprochement peut se faire avec les révolutionnaires en 1789 qui demanderont la fin des lettres de cachet permettant au roi d'arrêter qui bon lui semble sous n'importe quel prétexte sans avoir à se justifier.
Mais revenons au film , on ne va pas épiloguer sur les quelques erreurs ( anachroniques ), dont notamment le premier château clairement du XVe, l'épée longue à deux mains qui est franchement inadaptée pour un combat dans une forteresse, mais il s'agit là plutôt d'impressionner le spectateur que vraiment de chercher le réalisme historique ( les Templiers utilisaient plutôt des épées simples à une main, il était très rare d'en utiliser à deux mains, car trop lourde et difficile à manipuler surtout dans un milieu exigu ), et divers étrangetés : pendant l'invasion de Rochester on peut voir parfois la herse du château relevée ;)...
Cependant cela ne gache pas vraiment, voire pas du tout le film, on n'est pas sur un récit historique avec la véracité d'un reportage, mais plutôt sur un film d'action sanguignolant. Le titre est un peu trompeur mais moins que le dernier des templiers qui lui est nettement une escroquerie de titrage manifeste ;)
Le film par contre est assez réaliste sur les combats, avec le soucis des détails bien saignants : bras arraché, langue coupée en gros plan etc, sur ce point, c'est d'une violence incroyable. Mais on remarquera aussi qu'ils n'utilisent pas seulement la lame de l'épée mais aussi le pommeau de l'épée, les boucliers pour frapper et se défendre etc, sur ce point ils semblent qu'ils ont du avoir les conseils avisés de spécialistes.
Le film ne fait pas l'impasse sur de beaux plans, surtout au début, avec des effets de lumières digne d'un Ridley Scott. Cependant par la suite le côté carton pâte du château de Rochester reconstitué ( il existe toujours ), les plans parfois un peu étranges , l'aspect théâtral qui tranche avec les scènes d'actions et le scénario un peu faiblart ne permettent pas au film d'être un très bon cru .
Par contre les acteurs principaux sont crédibles et plutôt réussis notamment avec le Templier principal, Jean sans terre et certains seconds rôles, même si la chatellaine n'est clairement pas à son aise.
Donc du bon et du moins bon, mais globalement un film qui ne permet pas de s'ennuyer, mais qui n'est pas du tout pour les plus jeunes et les âmes sensibles. Noter que pour une fois les Français, avec Louis VIII dit "le lion", auront un rôle certes très modeste mais pas de méchants pour une fois :)
Sur ***** étoiles je lui mettrais **** en film d'action et *** en reconstitution historique.
[MAJ:24-02-2012] -CB
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Addendum : Après avoir vu le film, je dirais les choses suivantes : le titre est mensonger tout d'abord parce que le héros du film porte une croix Hospitalière et n'a donc rien à voir avec les Templiers ! rappelons que ce sont deux ordres totalement différent, voir concurrent parfois. Dans le film les combats entre les croisés et les sarrasins est assez ridicule, voir drôle ! Pour autant si on enlève les parties historiques ridicules et fausses, les erreurs et autres ( dans le film on parle de la peste mais les malades ressemblent plutôt à des lépreux .... ), le film est pas trop mauvais dans son style : fantastique et d'action à l'américaine : c'est à dire un peu d'humour, de la castagne, un scénario basique, des bons et méchants, un happy end ( certes différents de d'habitude ), des effets spéciaux ( parfois franchement mauvais ) et un mélange des genres parfaitement inculte ( faut surtout pas trop réfléchir et chercher la petite bête ).
Je m'attendais à pire donc je n'ai pas été trop déçu, mais encore une fois le titre est vraiment mal trouvé !
Le dernier des templiers réalisé par Dominic Sena et en salle le 12 janvier 2011.
Casting: Nicolas Cage, Ron Perlman, Nick Thomas-Webster
Synopsis: Après des années de croisade en Terre sainte, le templier Behmen et son fidèle compagnon, Felson, reviennent en Europe, désabusés. Alors qu’ils aspirent à une vie paisible, ils découvrent leur pays ravagé par la peste noire et se retrouvent appréhendés par les hommes du Cardinal.
Accusés d’avoir déserté, ils risquent la prison. Ils n’ont pas d’autre choix que d’accepter une étrange mission. Ils doivent escorter une mystérieuse jeune femme, désignée comme une sorcière responsable de l’épidémie, jusqu’à un lointain monastère où elle sera jugée et où sera pratiqué un ancestral rituel purificateur…
À travers des terres hostiles et dévastées par la maladie, dans des contrées sauvages, Behmen, Felson et quelques autres, se lancent dans le plus dangereux et le plus fascinant de tous les périples. Alors qu’aux yeux de Behmen, la jeune femme apparaît de plus en plus comme un bouc émissaire, d’étranges phénomènes se produisent. Tous ne vont pas tarder à découvrir les effroyables forces qui les attendent…
Mon avis : Au vu des extraits de la bande annonce on se retrouve face à un énième “le dernier des templiers” ( après dolph lundgren et son navet fantastique “ le dernier templier” ), rien de bien historique à se mettre sous la dent. Les combats avec des personnages en 3D du plus mauvais effet ( on dirait le jeux Medieval Total War ), un “blockbuster” dont le seul intérêt est “l’Entertainment” à l’américaine mais on ne peut pas reprocher quoi que ce soit au film il ne promet rien de plus. Rendez vous donc au 12 janvier dans les salles obscures.
Va t’il entrer dans le Nanarland ? telle est la question ! A noter que Ron Perlman l’autre héros du film n’en est pas à son premier chef d’œuvre du genre : http://www.nanarland.com/Chroniques/Main.php?id_film=icepirate
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Kingdom Of Heaven, fiction et réalité du film
Royaume des Cieux

Sommaire du film Kingdom of Heaven
- Introduction
- Baudoin IV roi de Jérusalem
- La reine Sybille
- Saladin
- Balian d'Ibelin
- Renaud de Châtillon
- Guy de Lusignan
- Conclusion
Voir aussi. l'excellent article sur le sujet : Kingdom of Heaven à l'épreuve de la réalité historique.
Malgré un succès mitigé dans les salles obscures, ce film n'a pas cependant perdu d'argent mais a suscité moins d'intérêt que prévu, ce long métrage 'historique' aura quand même fait parler beaucoup de lui et couler autant d'encre.
Le film n’est pas neutre et pas vraiment complaisant, ni envers les croisés, ni envers les musulmans, même si probablement pour ne pas entrer dans une confrontation « méchants» « gentils» qui aurait pu sembler trop évidente, Ridley Scott a pris le parti d’adoucir le monde musulman et surtout Saladin. Ce qui a pour effet de lisser énormément certains personnages et d’en caricaturer d’autres ( principalement croisés). Le soucis majeur c'est que selon le public les interprétations et la sensibilité sur certains sujets deviennent vite épidermiques...rendant alors le débat obscur, on peut noter aussi qu'il n'a pas chercher à légitimer les Croisés ou les Musulmans.
Même si Ridley Scott n’a rien à prouver en terme de réalisation et de succès sur ses films, il est contraint de respecter des impératifs de coûts et de délai, par rapport aux producteurs. Ce qui souvent amène à dénaturer un fait réel en un fait de fiction pour une meilleure crédibilitée cinématographique. Paradoxalement parfois le film s’éloigne du fait réel et donc d’une certaine vérité, ce qui ne veut pas dire que l’intensité est biaisée. Ridley a coupé plus d’une heure de film pour répondre aux attentes des producteurs, qui étaient pour leur part inquiet de la longueur du film qui était de 3h40....malheureusement cette coupure nette a largement contribué à rendre certains personnages, surtout les croisés, relativement caricaturaux donnant l'impression d'un monde musulman tolérant, ouvert et non violent ce qui est loin de la vérité historique, il faut rappeler que les croisades sont nées justement de l'invasion musulmane et des diverses violences et exactions sur les Chrétiens ( conversion de force, esclavage surtout ) .
Kingdom of Heaven se situe donc entre deux eaux : beaucoup de faits réels, mais entrecoupé de faits fictions ou de suppositions, mais aussi de parti pris sur des sujets importants.
Il aurait fallu probablement plusieurs heures de films en plus pour donner une crédibilité plus profonde et plus historique de cette période riche en événement et qui encore aujourd’hui à des effets dévastateurs sur les opinions.
Il faut prendre en compte que ce film n’est pas un récit ou un documentaire historique, mais une interprétation cinématographique portée sur un écran avec l'objectif de rentabiliser les millions de dollars investis. Cependant le travail sur une réalisation réaliste historiquement est manifeste.
Il est noter que Ridley Scott ,cherchant cependant à faire un film crédible historiquement, ne la pas vendu comme tel, nette différence avec Luc Besson avec son film "le Messager" voulant faire croire à un film sur l'histoire de Jeanne d'Arc alors qu'il est bourré d'erreurs historiques, d'intéprétations douteuses, de fabulations totales; Tant qu'à Jeanne dans le film il a réussi à la faire passer pour une folle, ce que les Anglais n'avaient pas réussis, avec un air de nageuse de l'Est dopée à la caféine aux cheveux décolorés....ce qui est très loin d'être le cas historiquement parlant, mais le film en terme cinématographique est par contre réussi. À mon avis Ridley Scott est justement un des rares réalisateurs à pouvoir faire un film presque historique tout en le rendant passionnant et visuellement travaillé ( décors, paysages, etc )
Bref historique pour situer l'époque du film :
L’histoire se passe principalement juste avant la IIIe croisade (1189-1192), Baudouin IV dit le lépreux est mourrant et une guerre interne se fait sentir pour prendre sa succession. Cela est d’autant plus vrai que Baudouin V (fils de Sybille), ne survivra pas plus d’un an au trône, il sera par ailleurs totalement éclipsé dans le film ( version cinéma, ce qui n'est pas le cas de la version Direcor's Cut ). Les rois de France ( Philippe Auguste ) et d'Angleterre ( Richard Coeur de Lion ) ne sont pas encoré arrivés mais font pression pour que Guy de Lusignan ne remplace pas Baudouin IV. Saladin réussie à réunir les diverses factions musulmanes contre les chrétiens et menace de plus en plus dangereusement Jérusalem....
N'oubliez pas de lire cet article, le plus précis et le meilleur du genre : http://www.montjoye.net/le-film-kingdom-of-heaven-a-l-epreuve-de-la-realite-historique

Le château de Loarre, en Espagne, où fut tourné une partie du film de Kingdom of Heaven.
(1161-1185) roi de Jérusalem (11 juillet 1174— 16 mars 1185), fils d'Amaury Ier et de Agnès de Courtenay.
Baudouin IV est devenu roi à seulement 13 ans, en 1174. Ce qui pour l’époque est quand même très jeune pour régner, même si la régence fut faite par Raymond III de Tripoli pendant les deux premières années. Malheureusement vers ses 15 ans, on découvrit qu’il était lépreux, ce qui ne l’empêcha de se battre vaillamment contre Saladin avec panache, courage et beaucoup d’intelligence tactique. Il bénéficia par ailleurs dis t’on d’un physique exceptionnellement beau.
Le 24 novembre 1177, alors que l'armée Croisée est nettement inférieure en nombre, se déroule la bataille de Montgisard.
La victoire de Montgisard fut écrasante et pesa lourd dans l’esprit de Saladin et de son armée. Les forces Franques, on pourrait presque dire française, était globalement déjà très redoutée et cette victoire à 1 contre 20 était de nature à mystifier et à faire peur à une majorité de soldats arabes. Saladin semble t'il avait un respect de Baudouin IV et préférait dans certains cas ne pas vouloir se battre, ce qui à donné à Saladin le terme Saladin dit "le sage". Il fut plus sage par rapport au fait qu’il économisait son armée et des massacres inutiles que par sa générosité.
Cette victoire éclatante d’un roi diminué par la lèpre (maladie terrible pour l’époque, car atroce et profondément mutilante) fit de Baudouin IV un roi légendaire, qui préférait mourir malade au combat que dans un lit à attendre sagement la fin comme lui conseillait par ailleurs hardiment la majorité de sa cour.
Ces faits, bataille et courage face à la maladie, n’expliquent pas seulement la popularité de ce roi même chez ses ennemis. Il faisait preuve d’une certaine justice dite chrétienne, peut être pas aussi excessif que Saint Louis même si un rapprochement peut se faire dans l’attention et les faits, et d’un sens politique très poussé. Il arrivait quand même à gérer une ville qui se composait de musulmans, juifs et chrétien, sans problème majeur inter religieux, ce qui aujourd’hui dans un contexte international tendu est presque impensable.
La lèpre à cependant affaibli rapidement Baudouin IV l’obligeant à venir sur les champs de bataille sur une civière faisant office de trône…. Malheureusement ce fait est complètement occulté dans le film Kingdom of Heaven, car pendant la rencontre avec saladin dans le film il est à cheval, certes agonisant, alors que dans la réalité il fut amené allonger et probablement aveugle. Les écrits relatent de cette rencontre que Saladin fut tellement choqué par l’état piteux du roi, qu’il en eut peur et qu’il partit sans demander son reste. Il faut voir que Saladin respectait beaucoup Baudouin IV et avait déjà une peur évidente, mais peut-être avait-il comprit qu’il valait mieux attendre sa mort et combattre par la suite, en profitant des luttes de pouvoir pour sa succession.
Baudouin mourra à l’aube de ses 24 ans le 16 mars 1185, profondément mutilé et méconnaissable. Sur ce point, on peut sûrement penser que l’image atroce représentée dans le film est proche de la réalité, tellement la lèpre est défigurant et mutilante. Baudouin aura tenté d’organiser sa succession avec le soit disant incompétent Guy de Lusignan, en vain. Il fut enterré sur le mont Golgotha là où Jésus fut crucifié, tout un symbole.
La mort de Baudouin IV sonnera le glas des chrétiens déjà aux abois dans la région et permis à Saladin d’éclatantes victoires, elle sera un tournant dans l’épopée des croisades, car les forces chrétiennes ne possédaient plus vraiment d’un dirigeant militaire et politique de qualité dans la région. La venue du roi de France Philippe Auguste et du roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion, n’y changera pas grand-chose, car eux-mêmes déjà empêtré dans les luttes internes européennes.
Baudouin IV, dans une moindre mesure et une échelle moins importante, est comparé à Saint-Louis dans le sens politique, de justice de courage et d’obstination. Mais Baudouin IV possédait une qualité innée de stratège et de sens tactique ce que Saint Louis n’avait pas eu dans la région.
Dans le film Kingdom of Heaven Baudouin IV est à mon sens parfaitement représenté et bénéficie logiquement d’une excellente reconnaissance méritée et légitime.
Sibylle de Jérusalem (1159— décés à Acre le 21 octobre 1190), reine de Jérusalem, fille d'Amaury Ier de Jérusalem et d'Agnès de Courtenay, sœur de Baudouin IV.
Mariée en 1176 avec Guillaume VI de Montferrat (1150-1177), comte de Jaffa et d'Ascalon. Ils auront un fils qui sera le prétendant légitime à Baudouin IV, Baudouin V né en 1178 et mort en 1186, soit seulement un an après celle de Baudouin IV. Elle eu également deux filles mortes en même temps qu’elle.
Elle se mariera en 1180 avec le cadet de la famille des Lusignan, Guy qui n’était pas pourtant un parti financièrement intéressant pour une reine, mais parait-il très beau.
Son rôle dans le film est essentiel, mais complètement à mon sens bafoué Il n’a jamais été fait état d’une quelconque relation avec Balian d’Ibelin, en tout cas dans la réalité. Par ailleurs elle est morte jeune et à Âcre pas en France.
Son rôle dans la réalité des faits est difficile à déterminer même si on peut supposer qu’il fut important, mais quand même relativement discret. On peut dire que Ridley Scott a largement pris des libertés dans la création de ce rôle et ne reflète pas grand-chose de réel.
On pourra noter le rôle joué par la belle, il faut admettre qu'elle est une des plus jolies actrice de France et aussi l'une des plus talentueuse qui l'immense avantage d'être parfaitement anglophone, Eva Green, fille de Marlène Jobert, avec une beauté tout à fait royale et une excellente prestation.
D'origine Kurde, il est né en 1138 à Takrit dans une famille Kurde, en Mésopotamie (partie Kurde d'Irak), Salah aldin Yusuf al-AyyubiSaladin, décès le 4 mars 1193.
Entre 1164 et 1169, il se distingua au cours de trois luttes afin de protéger le califat fatimide décadent d'Égypte contre les attaques des Croisés chrétiens établis en Palestine. À la mort de son oncle en 1169, il lui succéda au poste de vizir du calife fatimide du Caired.
Saladin permit à l’Égypte de redevenir un important pays, militairement et économiquement. Il s’appuya très clairement sur l’Égypte pour étendre son territoire et fut l’incitateur du renouveau du Jihad.
Il ne faut souligner que pendant sa lutte pour obtenir le pouvoir, il dut batailler sans merci contre ses ennemis intérieurs. Il fut par ailleurs peu clément, tuant et exécutant ses ennemis. En aucun cas c’est un pacifiste, tout comme Mahomet qui fut principalement un chef de guerre, n'hésitant pas à piller, faire décapiter si nécessaire, accepter le viol en Islam ( voir hadith à son sujet ) et s'attaquant aux caravanes diverses. Dans un sens Saladin respecte son prophète Mahomet.
Ses relations avec Baudouin IV étaient certes respectueuses, mais ce fut surtout avec Richard Cœur de Lion que sa relation fut beaucoup plus profonde. Il envoya même son médecin personnel lors de la maladie du roi d’Angleterre….
Les relations entre Richard Cœur de Lion et Saladin permirent au monde chrétien de subsister dans un vaste territoire, même si Jérusalem appartenait à Saladin, laissant cependant les chrétiens vivre leur religion dans une certaine quiétude temporaire. Il faut voir que Philippe Auguste était déjà parti depuis longtemps.
C’est à mon avis le rôle le plus controversé dans le film. On sent très nettement une volonté de Ridley Scott de ne pas vouloir ancrer Saladin d’un rôle facile de méchant perfide.
Dans les critiques que j’ai pu voir on peut constater deux courants : ceux qui pensent qu’on a donné à Saladin de rôle de sauvage et de méchant, d’un autre ceux qui pensent qu’on a voulu faire croire que Saladin était un être courageux, respectueux et absolument pas sanguinaire qui a fortiori donne aux croisés un rôle de méchant incarné par Guy de Lusignan et Renaud de Chatillon.
Les choses sont plus complexes et si on peut reprocher à Ridley Scott une approche approximative du personnage, il a quand même donné à Saladin un rôle ambigu, mais fort. On peut même supposer que le film principalement destiné aux occidentaux, européens et américains, avait le but d’enclencher une certaine réflexion ce qui a eu pour conséquence d'induire un certain malentendu.
Un exemple après la bataille de Hattin il fit égorger publiquement à Damas 300 chevaliers des Templiers restants, ce fait n’est pas éclipsé par Ridley puisqu’il montre une image d’un tas de tête coupée sur le sol. Cette image est un peu biaisée, car on pourrait penser au résultat de la bataille, ce qui à mon avis en est rien. Puisque l’image se passe bien après la bataille dans le film, l’ambiguïté se joue justement dans cette image. À aucun moment on ne montre Saladin donné l’ordre de les exécuter. On montre un fait réel, mais qui s’en connaissance ou justification peut-être interprétée différemment. ( Ce fait dans la version Director Cut est justement mis en avant et Saladin se justifie, changeant totalement la teneur du film entre celui passé au cinéma édulcoré et la version Director Cut's largement plus équilibré )
Il faut voir que Saladin n’est pas un tendre envers les croisés, mais est loin d’être un sauvage, il possédait plutôt à mon avis une personnalité complexe. Saladin était doué d’une certaine intelligence politique, mais surtout un redoutable guerrier et financier.
Dans le film lors de la capture de Jérusalem, on pourrait sembler croire que Saladin laisse partir les chrétiens dans « la joie et la bonne humeur » sans aucun contre-partie. Dans la réalité, il n’en est rien, ceux qui pouvaient payer leur liberté pouvaient partir ou rester, les autres devenaient des esclaves ce qui fut le cas de la majorité des habitants. Certes Saladin aurait pu tous les massacrer, mais sa générosité s’arrêtait au porte-monnaie…. Ce fait complètement disparu lors de la tractation entre Saladin et Balian d’Ibelin, peut donc laissez supposer que Saladin a fait preuve de sagesse ce qui est vrai dans une certaine mesure sur le fond, mais pas sur la forme. Il est vrai cependant que cela est à mettre en comparaison avec la prise de Jérusalem par les croisés qui se termina dans un inutile bain de sang, massacrant musulmans et juifs.
Il était difficile à mon avis de refléter la personnalité de Saladin. Le terme de Saladin dit "le sage" provient plus de sa capacité à utiliser la patience et la ruse au lieu d’affrontement inutile, que vraiment d’une personnalité sage.
Mais que ça soit dans le monde musulman ou chrétien, il fut une personnage respecté comme étant un Sultan respectueux et un combattant honorable, courageux et doué. Il est assez clair qu'il fut le premier réel contact civilisé entre combattants musulmans ( en dehors des combats ) et Chrétiens.
Rare les personnages musulmans à avoir cette image, mais il faut cependant rappeler qu’il est à l’initiative du Djihad que l’on connaît relativement encore aujourd’hui.
Date de naissance et lieu inconnu mais décès en 1193.
Je vais casser de suite des erreurs énormes, mais volontaire, du film. Tout d’abord Balian d’Ibelin malgré ses origines françaises, n’est pas né en France et n’y est probablement jamais venu. Deuxième erreur importante, il était seigneur de Naplouse et fils en effet de Balian d’Ibelin père fondateur de la famille transformé dans le film en Godefroy d’Ibelin.
Le père n’est donc jamais venu en France rechercher son fils martyrisé par la mort de sa femme. On pourra noter aussi le rôle cruel du prêtre français qui usera de ses pouvoirs pour essayer de rabaisser Balian d’Ibelin. Là encore on peut se poser la question de cette relation, qui à mon avis est franchement maladroite ou significative de ce que pense Ridley Scott de la religion catholique.
En résumé Balian dIbelin est fils d'immigré français qui connait les us et coûtumes de la région et semble avoir un contact plus rationnel envers les musulmans, qui rappelons le en comparaison de la religion Juive et Chrétienne est très récente.
Encore une fois , Ridley a pris de sacrée liberté sur ce personnage et dès le départ du film c’est l’apogée !
Quel à été le rôle de Balian d’Ibelin à Jérusalem et auprès de Baudouin IV ?
Il faut voir tout d’abord que Balian d’Ibelin a participé à la bataille de Montgisard, voir aussi cette vidéo, auprès de Baudouin IV, ce qui lui vaudra une renommée de guerrier. On est donc loin dans le film du " p’tit jeune" qui n’y connaît rien. Il a été élevé probablement pour devenir chevalier d’autant qu’il était le troisième enfant et donc pas prétendant direct à son père.
De plus il participa à la bataille de Hattin mais réussit à s’échapper comme un grand nombre de chevaliers. Mais il est vrai cependant qu’il participa à la défense de Jérusalem avec Sybille et le patriarche Héraclius. Pour une fois un représentant religieux chrétien dans le film obtient un rôle moins guerrier et nauséabond.
Ridley Scott donne donc à Balian un rôle un peu usurpé en démontrant une capacité de stratège et de fin tacticien, alors que Saladin tentait d’éloigner les forces chrétiennes le plus loin possible des points d’eau et de vivre.
Cette défense héroïque de Jérusalem qui permit de sauver un grand nombre de vie humaine, fut beaucoup quand même sur le fond très difficile. Une grande partie des armées avait soit péri, blessée à la Bataille de Hattin ou dispersée dans d’autres forteresses éloignées. Par ailleurs le siège dura suffisamment longtemps pour poser d’énormes problèmes de vivres et d’eau.
Balian d’Ibelin perd après cette bataille de Jérusalem tous ses territoires (Naplouse, Rama et autres) que Saladin conquis un par un. Cependant, il a eu le droit de vivre à Tripoli.
Les relations avec Guy de Lusignan sont très calculées et pas vraiment chevaleresque.
Lors du règne de Baudouin IV, il fait parti de ceux qui proposèrent de faire devenir roi Baudouin V malgré son jeune âge pour éviter que Guy de Lusignan ne le devienne. Malheureusement Beaudouin V meurt étrangement très jeune et 1 an après son accession au trône. Rien ne permet aujourd'hui de dire qu'il fut empoisonné ou qu'il avait la lèpre, même si bien sûr toute les options criminelles à ce sujet sont possibles. Cependant la mortalité dans cette région était assez forte surtout pour les enfants.
Après la mort de l'enfant il ne restait plus que Guy de Lusignan prétendant officiel. Ce moment est totalement éclipsé ( dans la version au cinéma mais pas dans le director Cut ) par Ridley Scott, néanmoins cela n’avait pas une importance énorme vu que le résultat fut le même en définitive, mais avec un an de décalage.
Par la suite il préféra soutenir Guy de Lusignan face à Conrad de Montferrand qui lui-même était soutenu par Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion, ce que le frère de Balian réprouva totalement en partant pour Chypre. Il changea cependant d’avis lors du mariage de sa belle fille avec Conrad. À la mort de Conrad de Montferrant mort peu de temps également après son accession au trône de Jérusalem, c’est Henri II de Champagne qui devint roi de Jérusalem, il possédait la particularité d’avoir deux oncles prestigieux : un Roi de France, Philippe Auguste et un roi d’Angleterre avec Richard Cœur de Lion.
Balian d’Ibelin participa aux négociations avec Richard Cœur de lion qui lui-même désirait partir retourner aux affaires du pays, surtout inquiet il est vrai du retour précipité de Philippe Auguste peu enthousiaste d'intervenir dans cette croisade. Cet acte permit à Balian d’Ibelin d’obtenir du roi d’Angleterre la seigneurie de Ceymont malgré qu’il fût aux ordres de Saladin….
On peut donc imaginer que Balian d’Ibelin était comme beaucoup un opportuniste de carrière, intelligent et pas aussi fidèle que dans le film et encore moins proche de la chevalerie française, en tout cas dans ses fondations. Mais sa parfaite connaissance de la région et magnanime fit de lui un personnage privilégié et indispensable. Cependant le réalisateur a largement dérivé de la réalité pour finir même par donner une image de Balian d’Ibelin beaucoup trop loyale et surtout l’amant de Sybille……
Il fait partie des ‘méchants’ dans le film. Son rôle , dans les faits, est semble t'il à l’origine de la défaite de Hattin, même si les rôles sont à préciser. Mais encore une fois Ridley Scott aura particulièrement caricaturé le personnage.
Printemps 1153 : Il devient prince d'Antioche.
1156 : Il envahit l'île de Chypre.
1160 - 1177 : Prisonnier en Syrie pendant 17 ans.
Février 1183 : Expédition pour prendre Médine et la Mecque, après un an de préparation.
4 juillet 1187 : Bataille de Hattin
Chevalier pauvre, Renaud de Châtillon est le fils cadet d'un seigneur de Châtillon-Coligny. Dés son plus jeune âge il part en croisade espérant comme beaucoup trouver richesse et le salut éternel. À l’époque les chevaliers, combattants ou toute personne partant combattre les musulmans, bénéficiait automatiquement du salut éternel , le partage des butins sur le chemin, ce qui permis à un grand nombre de personnages de toute origine familiale de s’enrichir. Ses exploits guerriers lui permit de se marier avec une princesse , la veuve Constance, et devint prince d’Antioche. En 1156 , il envahit l’île de Chypre prenant comme excuse une dette non remboursée par l’empereur de Byzance, Manuel Commène.
Cependant par peur de représailles contre sa personne, il participa avec Manuel Commène au siège d’Alep en 1158. Il fut cependant capturé lors d’un pillage, il sera emprisonné presque 17 ans. Il fut libéré mais ne retrouva pas son trône d’Antioche qui avait trouvé acquéreur en la personne du fils même de Constance. Amaury Ier , roi de Jérusalem, lui permit cependant de prendre la seigneurie d’Outre-Jourdain ( partie actuelle de la Jordanie ) et d’Hébron dont le fameux fort de kerak.
L’attaque de la caravane …pas la première ni la dernière ….
Ce n’est pas la première fois qu’il s’attaque à des caravanes de pèlerins ou de commerçants musulmans, rompant par de même la trêve. L’une d’entre elle en 1181, ne fit pas réagir Saladin, c’est surtout l’expédition contre la Mecque et Médine qui fit prendre conscience Saladin de la dangerosité de seigneur de Kerak. Le château de Kerak ( ou Karak ) existe encore dans l'actuelle Jordanie.
Château de Kerak ( ou château de Al-Karak ), ancien château de Renaud de Châtillon aujourd'hui en Jordanie, à l'époque il était dans le territoire du royaume de Jérusalem.
L’attaque contre une caravane de pèlerin et commerçants se rendant à la Mecque : la sœur de Saladin n’y a jamais fait partie, elle n’est donc pas morte tuée par Renaud de Châtillon. Ce qui est vrai cependant c’est qu’il a attaqué à plusieurs reprises des caravanes principalement marchands ou de pèlerins en dépit des accords passé entre Baudouin IV et Saladin après la victoire du premier au Montgisard. Par ailleurs dans le film il semble que Renaud de Châtillon massacre tout le monde, ce qui n’est pas le cas, puisque au moins une partie sera enfermée dans le fort de Kerak.
Plus tard il s’attaqua encore une nouvelle fois à d’autres caravanes, Saladin décida de réagir en partant vers Kerak avec son armée, pour le punir.
Baudouin IV apprenant l’assaut fait préparer à grande hâte son armée. Le roi de Jérusalem n’avait pas intérêt à ce que Kerak chute, emplacement stratégique par excellence. Ce qui amena la rencontre entre Baudouin IV et Saladin. Il est évident que Saladin en voyant l’armée du roi et ayant le bénéfice d’être sur son sol ne pouvait prendre le risque d’y engager un combat au résultat plus que hasardeux. Saladin gardait en mémoire la mémoire la terrible défaite en 1177 où il faillit de justesse être prisonnier voir tué.
Si la punition fut sans équivoque de la part de Baudouin IV, cela n’a pas empêché Renaud de conspirer contre le roi évoquant à plusieurs reprises invoquant la trahison envers les chrétiens, il est assez clair qu’il voulait en découdre avec Saladin.
Renaud de Châtillon est cependant une personne qui a un fort passé guerrier et bénéficie par ailleurs d’une large reconnaissance même auprès de Baudouin IV. Le roi a quand même sauvé la vie de Renaud dans un moment difficile mais si c’est peut-être plus tactique qu’une réelle volonté de le sauver. Dans le film on peut le prendre pour un imbécile violent, mais encore une fois je ne prends pas de risque à dire qu’il faut largement nuancer cette vision des choses.
Renaud de Châtillon ennemi numéro 1 des musulmans
C’est probablement le plus radical des seigneurs chrétiens dans la région. Ni son temps passé en prison ( pendant 17 ans ) ni ses défaites et victoire ne l’auront adoucis. Il prévoyait notamment d’attaquer la Mecque par la mer, ce qui aujourd’hui serait une déclaration de guerre mondiale mais qui pour l’époque n’était pas aussi irréaliste. Renaud de Châtillon était un seigneur téméraire allant jusqu’au bout de ses convictions et plus fin que l’on pourrait le croire.
Les circonstances de la mort de Châtillon
Dans son ensemble on peut considérer que la mort de Châtillon sous la tente de Saladin fût réelle et proche de la réalité. Mais il faut apporter plusieurs faits importants et explications.
Tout d’abord lors de la présentation de l’eau ou du breuvage à Guy de Lusignan, c’était pour lui signifier qu’il était le bienvenu mais surtout qu’il aurait la vie sauve selon la coutume. Renaud pris donc cette coupe en espérant justement en profiter …. Saladin fut en colère et dit : « Ce maudit n’a pas ma permission pour boire de l’eau. Car s’il le fait, je lui devrai la protection. », on peut considérer que pour Saladin la mort du seigneur de Kerak ne faisait plus aucun doute bien avant l’effronterie de Renaud ( ce qui amène à penser que Renaud était moins idiot qu’on pourrait le croire dans le film ).
La conversion à l’Islam fut proposée à Renaud en échange de la vie sauve, ce qu’il refusa : selon le coran un musulman ne peut tuer un autre musulman sans raison valable, il lui est cependant permis de le faire contre les infidèles. Il lui coupa la tête et déclara : « J’avais juré par deux fois, commenta-t-il, de le tuer si je me saisissais de lui. La première, c’était lorsqu’il avait entrepris de marcher sur la Mecque et Médine, et la seconde, c’était lorsqu’il avait attaqué la caravane et qu’il s’en était traitreusement emparé. » C’est seulement après qu’il fit exécuter les chevaliers templiers et hospitaliers.
Selon le camp où l’on se place il est un héros voir un martyre de la cause chrétienne de l’autre un radical extrémiste anti musulman et pour certains celui qui à causé la perte du monde chrétien en orient. Un personnage haut en couleur qui ne peut se résumer à son action dans le film.
Né en France, probablement dans le Poitou, en 1159 mort à Chypre en 1194, roi de Jérusalem (1186-1192), puis roi à Chypre (1192-1194), fils cadet de Hugues VIII le Vieux, seigneur de Lusignan et comte de la Marche, de Jaffa (de courte durée ), de Bourgogne et de Rançon. Marié à Sybille la sœur de Baudouin IV, ce mariage lui permettra plus tard d’accéder pour une courte période au trône du Roi de Jérusalem.
Personnage clef du film considéré dans le film ( et dans l'histoire ) comme un incompétent et n’ayant aucune réelle légitimité en tant que roi de Jérusalem. Dans le film il a rôle de guerrier sanguinaire et impulsif. Si il est responsable en partie de la terrible défaite de Hattin, son rôle sur le fond est quand même à nuancer.
Lors de la dernière escapade meurtrière de Renaud de Chatillon contre une caravane musulmane, Guy de Lusignan refusa de le punir sévèrement, ce qui amena Saladin à vouloir partir en guerre en s'attaquant à la ville de Tibériade. Le roi de Jersualem n'était pas cependant motivé pour aller sauver la ville de Tibériade gouverné par Raymond de Tripoli qui lui même suggéra au roi de ne pas y aller. Raymont III de Tripoli prétextant probablement un piège de Saladin pour emmener les chevaliers loin de tout point d'eau et de vivre. Guy de Lusignan avisé de ce stratagème préféra au départ ne pas intervenir. Par ailleurs une majorité des Hospitaliers et de l'ensemble de la chevalerie n'était pas non plus fortement motivé et préféraient attendre Saladin.
Mais sous l’impulsion de Renaud de Chatillon et de la forte pression du maître de l’ordre des templiers Ridefort ( notamment pendant des heures la nuit ....) Guy de Lusignan fini par prendre la terrible décision d’envoyer une majeure partie de la chevalerie Franque (principalement des chevaliers français) à un massacre et une défaite terrible pour le morale et la suite des croisades. Son rôle donc dans le film d'une personne voulant absolument en découdre avec Saladin est très loin de la réalité.
Par ailleurs Guy de Lusignan, grâce au bon vouloir de Richard Cœur de Lion, deviendra roi de Chypre avec globalement une certaine réussite, mais très courte (mort deux ans après son accession au trône). Français ses relations sont cependant tendues voir très mauvaise avec le roi de France de l’époque.
Phillippe Auguste semble voir d’un mauvais œil ce personnage prendre de l’ampleur et du pouvoir dans une région difficile et bien sûr très symbolique, d’autant que sa bonne entente de circonstance avec Richard Cœur de Lion ne va pas arranger les choses. Même s’il est vrai que pendant l’époque Philippe Auguste et Richard Roi d’Angleterre seront dans une trêve de principe et décidera d’un commun accord de laissé Guy de Lusignan roi de Jérusalem….Pour le remplacer plus tard en 1192 par Conrad de Montferrat. En échange Richard Cœur de Lion offrira Chypre à Guy de Lusignan… pour y laisser sa famille plus de quatre siècles.
S’il est établi qu’il est globalement responsable de la défaite de Hattin, sa passion pour la guerre est à mesurer. Il aura par ailleurs toujours su tirer profit des situations avec une certaine aisance, ce qui laisse supposer qu’il n’était peut-être pas aussi mauvais militairement et surtout politiquement. La pression juste après son accession au pouvoir, par deux personnages ayant une certaines puissance et un aura ( Ridefort et Renaud de Châtillon ) va peser lourd dans la balance. Probablement soucieux de garder la maitrise politique et ne voulant peut-être ne pas se montrer faible face à des légendes et aux chrétiens d'orient, il va finir par prendre la décision d'envoyer l'armée. Pour autant son hésitation fut grande et à juste titre. Cette défaite de Hattin n'est en fait pas passée loin d'une inexistance totale et peut-être d'une victoire définitive sur Saladin, mais comme souvent une bataille se joue parfois à peu de chose. Avec le temps j'ai donc beaucoup changé d'avis sur Guy de Lusignan, souvent mal considéré et ma perçu soit par les historiens soit par les médias quand ils en parlent. Pour autant quand on y réfléchie bien et qu'on voit le contexte, j'ai fini par me dire que les choses sont moins claires et précis qu'on ne le dit. Guy de Lusignan, sans être probablement le roi de Jérusalem qu'on attendait, a été roi deux fois et si il a mené la défaite de Hattin, il est très loin d'être le seul responsable.
Chypre, la Turquie et la famille des Lusignan.
Avec le départ des discussions des pourparlers pour l’entrée de la Turquie dans l’Europe des 25, il m’a semblé important d’apporter une note historique à ce sujet. La famille des Lusignan se sont succédés avec plus ou moins de réussite pendant 400 ans, puis Chypre passe à la gouvernance de Venise jusqu'à l’invasion turque. Les forces turques massacrèrent une partie des habitants en les remplaçant par une population turque pour assoir et assurer à terme un rôle de colonisatrice face une île plus proche moralement de l’Europe que de l’esprit musulman. La partie turque aujourd’hui est actuellement occupée par les descendants. La reconquête dans les années 70 par l’armée Turque était essentiellement pour protéger cette minorité turque qui ne sait jamais vraiment intégrée à Chypre, d’autant plus que 200 000 des Chypriotes « grecques » ont du s’exiler. Aujourd’hui la Turquie ne reconnait pas Chypre en tant que pays, mais plutôt en tant que province, on peut se poser donc la question de l’entrée de la Turquie en Europe avec cette attitude.
Voir cet article : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/europe/chypre.htm
C’est peut-être l’un des plus grands reproches que l’on peut faire à Ridley Scott au niveau des personnages du film en ayant donné l’attrait d’un guerrier violent, mais globalement complaisant et influençable. Son rôle de « méchant » croisé n’est pas clairement démontré dans la réalité des faits, mais Ridley aura quand même bien montré la faiblesse politique globale du personnage, surtout en comparaison de Baudouin IV….

Au premier abord on pourrait penser que le film est mauvais historiquement et qu’il s'éloigne de la réalité. Si on peut dire que certains personnages sont largement imaginaires d’autres sont quand même très proche de la réalité. C’est donc une situation ambiguë ou rien n’est vraiment totalement faux ni vraiment totalement vrai. La qualité du film réside bien ailleurs, notamment au niveau de l’ambiance, de la reconstitution des chevaliers, des armées de saladin et voir même physiquement des personnages.
Le personnage de Saladin ,joué par un acteur syrien, ressemble vraiment étrangement à l’original en tout cas au moins dans l’imaginaire populaire. Pour les chrétiens c’est plus difficile puisque les rois et autres personnages importants étaient rarement représentés fidèlement dans les manuscrits, c’est seulement à partir de Saint-Louis que les choses changèrent avec une représentation fidèle des personnages royaux notamment, exemple les gisant de la basilique de Saint Denis : c’est Saint-Louis qui va vraiment sacralisé le lieu comme repos éternel des rois, leurs représentations seront par la suite après sa mort relativement fidèle à la réalité.
Ridley aura fait un effort conséquent pour donner une ambiance dans le film vraiment spéciale et qui semble particulièrement réaliste. Avec des personnages ambigus, extrêmes, intelligent, bête etc …. toute une panoplie de caractères qui ont chacun un rôle souvent un rôle déterminant dans le film. Pour beaucoup de personne l’époque des croisades et du moyen âge est violente, avec peu de développement intellectuel et une sauvagerie presque préhistorique.
La reconstitution des combats et des armées : Là vraiment le film fait vraiment très fort ! Tout est bien représenté avec un certain souci du détail parfois frappant. L’épée de Balian est typique des chevaliers français de l’époque. Les tenues sont rigoureusement fidèles dans leur ensemble. On sent que Ridley Scott a apporté tout son talent de réalisateur pour donner des combats réalistes sans non plus tomber dans le voyeurisme gore.
Car il faut bien s’imaginer que ces combats au corps à corps, frontal et direct étaient d’une extrême violence : tête arrachée à la masse, bras coupés à l’épée , corps mutilés, yeux crevés par les lances, blessures épaisses et décès dans d’atroces souffrances…. Toute une panoplie de blessures qui aujourd’hui pourraient dans la plupart des cas êtres soignées mais qui à l’époque étaient synonymes de mort quasi certaines.
Les armes du siège de Jérusalem : Là aussi trébuchet, catapulte, lance portée à l’horizontal pour se battre ( typique des chevaliers français mais qui à l'époque n'était pas utilisé cependant ), épée, boule de feu etc sont d’autant d’éléments véridiques et d’époques ( malgré quelques anachronismes inévitable ). Un souci du détail plaisant et qui permet d’apporter aux films une touche historique relativement fiable. Les chevaliers français à l’honneur, le film fait la part belle aux chevaliers de l’époque qui connaissaient déjà une apogée certaine dans les combats.
Il faut voir que le mot chevalier s’apparente à la base aux cavaliers français qui faisaient souvent preuves d’ingéniosité pour développer des nouvelles techniques de combat, comme la lance à l’horizontale typique des tournois mais inconnue à l'époque. Une réalité historique que Ridley Scott n’aura pas dénaturée et permit probablement de révéler l’esprit de l’époque. Un clin d’œil à la tradition chevaleresque, je me répète mais française, de l’époque qui fait plaisir à voir.
Si on peu reprocher quelques approximations historiques du film au niveau des évènements et des personnages, il faut noter le souci de réalisme au niveau des décors, des tenues et de la société. Sur ce point Ridley est presque irréprochable tellement l’investissement fut conséquent.
Je conseil cependant vivement de voir la version DIRECTOR'S CUT, qui était la version initiale de Ridley Scott, mais dont les producteurs avaient peur qu'elle ne soit trop longue dans une salle de cinéma. Elle est beaucoup plus proche de la réalité historique et surtout plus équilibré dans les personnages, la version diffusée au cinéma est quasiment une hérésie en comparaison de l'originale.
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LE FILM “KINGDOM OF HEAVEN” A L’EPREUVE DE LA REALITE HISTORIQUE
Texte et recherche par Lucas Eskenazi.
Cette page est probablement la plus précise, la plus complète et la plus pointue que l'on puisse trouver sur internet sur un rapprochement entre la réalité et Kingdom of Heaven. Le texte publié au 31 juillet 2009 n'est pas fini totalement mais au vu de la qualité et aussi de la densité de l'étude, j'ai pensé ( avec l'accord de l'auteur ) qu'il valait très largement d'être mis en ligne.

Château de Loarre en Espagne où fut tourné une partie du film.
Introduction
En premier lieu et compte tenu du caractère pour le moins inattendu de l’exercice, il convient de ne pas considérer cette étude comme un exposé universitaire (certaines libertés le démontrent). En effet, il ne s’agit pas ici d’établir une simple vérité historique au risque de se voir désobligeant face à un réalisateur tel que Ridley Scott (Gladiator...) ou même d’un scénariste comme William Monahan (il est l’instigateur de l’épopée et médiéviste à ses heures perdues) mais bien d’articuler les différents mouvements du film à une réalité parfois distante.
Ce qui nous amène à notre second point : pointez mécaniquement les inepties historiques du film serait se tromper de débat. Il ne s’agit ici pas de jouer au « jeu des sept erreurs ». Non plus de revêtir la cape du messie venue dans un acte rédempteur réinstaurer le droit canon mais uniquement de comparer ce qui est comparable dans son ensemble par rapport notamment au fait historique. Encore une fois, «Kingdom of Heaven» n’est pas un documentaire d’Arte !
Bien évidemment, Ridley Scott n’est pas un historien objectif mais cela ne signifie pas pour autant qu’il ne s’en réclame pas. Les codes et impératifs hollywoodiens (coûts pour les investisseurs, traductions, délais, histoires d’amours, manichéismes politiques….) entrent bien souvent en contradiction avec le rigorisme qu’impose une étude historique. Nous le verrons tout au long de notre étude. Quelque soit les aberrations (datations erronées, politiques actuelles préservées, caricatures de certains personnages…), «nous devons rendre à César ce qui appartient à César».
Ridley Scott a, autant que faire se peut, trouvé l’équilibre entre la thèse doctorale et le navet déplaisant. Il en résulte, si ce n’est une exactitude de l’échelle temporelle, la description d’une atmosphère, d’une époque autrement plus dense que l’on aurait pu le penser. En cela, le spectateur que je suis lui rend grâce car il aura sans nul doute permis au plus grand nombre de redécouvrir ces temps méconnus (rappelons que les meilleurs médiévistes du début du bas Moyen-Âge ont été ses conseillers durant le tournage). Il ne s’agit donc pas véritablement d’erreurs mais d’adaptations scénaristiques à un public contemporain : Ridley Scott savait parfaitement lorsque qu’il «travestissait» la réalité…
Soulignons qu’il aurait sans doute fallu une vingtaine d’heures pour pouvoir retranscrire au jour le jour ces trois ou quatre années d’histoire, leur donner une consistance plus en phase avec cette période riche en événements.
Cependant, n’oublions pas que le cinéma ne donne jamais lieu à une simple réalisation historique mais bien avant tout une interprétation cinématographique.
De ce fait, apprécions avec un certain recul la narration apportée à ce qui demeure avant tout une fable pour tout historien puriste…
Dernier point : mon étude porte sur la version longue du film, la «Director’s Cut » (3hr07), et non sur la version Cinéma (2hr25) telle que projetée dans les salles au moment de sa sortie. Pourquoi cette précision ? La «Director’s Cut» est, à mes yeux, la plus complète, notamment sur la psychologie et la découverte de certains personnages historiques (la vie de Balian avant son embarquement à Messine, la courte existence de Baudouin V….).
Fiche technique du film
. Réalisation : Ridley Scott
. Producteur : Ridley Scott
. Scénario : William Monaham
. Musique : Harry Gregson-Williams
. Photographie : John Mathieson
. Distribution : Twentieth Century Fox
. Budget : 130 millions de dollars
. Durée : version Cinéma (145 mins) ; version «Director’s Cut» (187 mins)
. Sortie : 6 mai 2005
. Distribution des rôles : (seuls les personnages difficilement identifiables au niveau historique ou très éloignés de la réalité sont ici brièvement développés, les autres ne sont que cités)
- Alexander Siding : vraisemblablement Imâd al-Dîn al-Isfahani (1125-1201). Il s’agit de l’émir à qui Balian laisse la vie sauve dans le film. Issu d’une famille de haute extraction proche du pouvoir seldjoukide (son père était un officier important sous les ordres du sultan Mahmud), il fut un écrivain de langue arabe d’origine persane, fin lettré (il avait étudié à Bagdad). Après avoir fait ses armes en tant qu’administrateur de villes puis enseignant, il devint le secrétaire de Nûr al-Dîn (royaume des Zengides) puis de son successeur, Saladin (royaume des Ayyubides). Il s’est intronisé «biographe officiel» de ce dernier et fit des descriptions utiles et précises sur la bataille de Hattin et la reconquête de Jérusalem. Comme le montre le film, il parvint effectivement à intégrer le cercle d’intimes qui restaient en compagnie de Saladin après que la plupart des émirs et fonctionnaires eurent quitté l’auditoire public, ce qui tend à prouver qu’il s’agit bien de lui. En revanche, étant né en 1125, il devait avoir 62 ans en 1187, Alexander Siding me paraît bien plus jeune…
- Brendan Gleeson : Renaud de Châtillon sur Loing, prince d’Antioche puis seigneur d’Outre Jourdain (?-1187).
- David Thewlis : sans doute Roger des Moulins, grand maître de l’Ordre de l’Hôpital. En effet, sans que son nom ne soit cité une seule fois dans le film, certains indices nous laissent penser qu’il s’agit bien de lui (les insignes héraldiques relevés sur son blason ; sa relation amicale, presque intime, avec un «grand baron» du royaume à savoir le régent Raymond III de Tripoli ; son esprit relativement avisé). Toutefois, il ne mourut pas à la bataille de Hattin comme le suggère le film mais durant la défaite de Séphorie quelques semaines plus tôt.
Il avait pourtant prévenu le grand maître de l’Ordre des Templiers, Gérard de Ridefort, de la folie que représentait cette chevauchée contre les 7000 cavaliers Ayyubides. Seuls trois templiers sur les 150 chevaliers présents purent échapper au massacre dont Ridefort.
- Edward Norton : Baudouin IV le Lépreux, roi de Jérusalem (1161-1174-1185).
- Eva Green : Sybille (1159-1190), reine de Jérusalem et sœur de Baudouin IV.
- Ghassan Massoud : Salâh al-Dîn Yusuf al-AyyubiSaladin dit Saladin (1138-1193).
- Jeremy Irons : Tibérias dans le film. Dans la réalité historique, il n’existe aucun Tibérias. Toutefois, ce personnage central a bien existé. Il s’agit de Raymond III, comte de Tripoli et prince de Tibériade (et non prince de Tibérias comme l’annonce Wikipédia).
Baron de premier plan, il fut à la suite de Guy de Lusignan le régent du royaume (1184-1186). Son mépris envers Guy est plus ou moins explicite dans le jeu de l’interprétation. En vérité, il était sans borne. Nous développerons par la suite sa psychologie au demeurant fort complexe. Néanmoins, il est intéressant d’observer que son nom a été modifié pour des raisons de commodité vis-à-vis des spectateurs anglo-saxons. En effet, « Raymond » et « Renaud » (Reynald en anglais) se prononcent pratiquement de la même manière : il fallait donc éviter toute confusion.
- Jon Finch : le patriarche de Jérusalem, Héraclius ( ?-1191). Là encore, son nom n’est pas explicitement cité mais son comportement ainsi que son rôle dans le film correspondent assez bien à celui d’Héraclius. Pauvre clerc du Gévaudan qui avait dû sa carrière à un physique avantageux et à la faveur de la reine douairière Agnès de Courtenay (mère de Baudouin IV), Ridley Scott nous montre un personnage proche de la réalité (d’où son authentification) : jouisseur, faible, lâche, adepte du nicolaïsme (mariage des clercs) mais toutefois un véritable exégète du droit canon (il a étudié à l’université de Bologne). Le film aurait pu néanmoins insister sur son aisance aux manœuvres et intrigues politiques au sein de la cour. Ajoutons qu’il fut le rival acharné (notamment pour le patriarcat de Jérusalem) et peut-être l’assassin indirect du vénérable Guillaume de Tyr, archevêque de cette ville, grand esprit de son temps et chroniqueur des croisades.
- Liam Neeson : Godefroy d’Ibelin ( ?-1151) dans le film. En réalité, le personnage tige (= fondateur) de la maison d’Ibelin se prénommait Balian, Balian Le vieux ou Barisian selon les sources et les époques. Encore une fois, le nom a été changé dans un souci de bienveillance vis-à-vis du spectateur (deux Balian, père et fils, cela aurait été une nouvelle source de confusion). Pourquoi avoir choisi Godefroy comme prénom de substitution ? C’est une référence à Godefroy de Bouillon, duc de Lotharingie en Basse-Lorraine, Avoué du Saint-Sépulcre et chef de la 1ère croisade en 1096-1099 (ainsi, Ridley Scott a sans doute souhaité voir transparaître les valeurs chevaleresques de courage et d’abnégation chez le père du héros du film). Quoi qu’il en soit le vrai Balian ou Barisian était mort depuis longtemps en 1184 (sans doute est-il décédé en 1151).
Rien d’étonnant lorsqu’on sait qu’il est cité dès 1115 et se trouve déjà être le connétable de Jaffa en 1120, soit 64 ans avant le début du film.
- Marton Csokas : Guy de Lusignan, futur roi de Jérusalem (1159-1186-1192-1194). Il est par ailleurs le frère cadet d’Amaury de Lusignan, connétable du royaume (qui n’apparaît pas dans le film).
- Orlando Bloom : Balian d’Ibelin. Plusieurs erreurs sont à noter sur le personnage principal du film. Ainsi, Balian ou Balian le Jeune n’est pas connu pour avoir été le beau jeune homme tel que le film le suggère mais plutôt le défenseur de Jérusalem lors de l’attaque de Saladin ainsi qu’un des piliers de la 3ème croisade (1189-1192). Si Orlando Bloom n’a pas trente ans lors de la réalisation, le vrai Balian a près de quarante cinq ans en 1187 (lors du siège de Jérusalem). En effet, sa date de naissance est incertaine (comme souvent à l’époque) mais semble se situer autour de 1142-1143 (certaines chartes, notamment musulmanes, nous donnent des précisions : il est majeur en 1158, il a donc 15 ans, or en 1155, il ne l’est pas). De même, s’il est bien le fils cadet de Barisian (Godefroy d’Ibelin) et donc d’origine franque, il n’était pas un bâtard de ce dernier.
En somme, Balian n’a jamais été élevé en France (il vivait principalement dans son fief de Naplouse) et son père n’a pas eu à aller le chercher en Occident.
Il a sans doute vécu toute sa vie dans les Etats Latins d’Orient et, comme la plupart des hauts seigneurs du royaume hiérosolymitain, n’est jamais allé en France. En outre, Balian n’a absolument pas été l’amant de Sybille mais le deuxième mari de la belle mère de cette dernière ! (Marie Comnène, nièce de l’empereur byzantin Manuel Ier Comnène et veuve d’Amaury Ier de Jérusalem). En revanche, le frère aîné de Balian, Baudouin de Ramla (non présent dans le film), a failli épouser Sybille mais il fut capturé par Saladin avant la fin des tractations (lors de la deuxième bataille de Marj ‘Ayûn le 10 juin 1179). Incapable de payer les 200 000 besants réclamés par Saladin au titre de rançon, il se tourna vers l’empereur byzantin Manuel Comnène afin de l’aider à régler la note mais Sybille préféra alors s’en remettre à la candidature plus «solvable» de Guy de Lusignan, qui de surcroît passait pour être le «plus beau chevalier de son temps» au point que, à en croire certains chroniqueurs, elle se serait laissée aller avec lui à des faiblesses que le mariage seul pouvait réparer.
Enfin, concernant la fausse bâtardise de Balian, Ridley Scott a semble-t-il voulu permettre au public de découvrir l’Orient et ses mystères par le biais d’un novice, Balian lui-même. Ainsi, le spectateur peut s’identifier à ce personnage tombé sous le charme de ce qu’il apprend progressivement à connaître et à aimer ; d’où l’intérêt de cette «duperie».
1. L’Etat du royaume hiérosolymitain en 1184 (commencement supposé du film)
Cette première partie a pour objectif de permettre au lecteur de comprendre quelle était la structure du royaume hiérosolymitain au début du film. De fait, à quels dangers devait-il faire face ? Par quelles alliances et compromis sa survie passait-elle ?
Ici, nous ne développerons pas d’analyse comparée mais tenterons seulement d’établir un «cliché instantanée» des Etats Latins d’Orient en 1184. Au préalable, il m’a semblé opportun de faire un retour en arrière.
a. La création du royaume de Jérusalem
Tout d’abord, n’oublions pas que les Etats Latins d’Orient ont pu survivre grâce à la Première Croisade (1096-1099). A aucun moment, il ne s’agit d’un plan d’expédition clairement planifié mais d’un hasard de circonstances. Pour autant, c’est au moment de la terrible prise d’Antioche et de la création du comté d’Edesse (1097-1099) que se forge une identité nationale hiérosolymitaine hostile au Khalifat de Bagdad.
Revenons succinctement sur la création de cet Etat.
Jusqu’en 1071, Jérusalem appartenait aux byzantins. Ces derniers avaient été relativement tolérants à l’égard des chrétiens pèlerins, juifs et marchands. A cette date, les turcs Seldjoukides s’emparent de tous ces territoires en écrasant l’empereur byzantin Basile II lors de la bataille de Mantzikert ou Malâzgerd. Cette installation turque semble avoir modifié les rapports avec la population chrétienne (cathédrales transformées en mosquées, humiliation quotidienne envers les Occidentaux, saccages des monuments Saints dont le Saint Sépulcre, pèlerinages rendus difficiles…). Pourtant, le commerce reliait depuis longtemps les deux rives de la Méditerranée (un célèbre texte d’Ibn Khordadbeh décrit l’activité des juifs de Babylonie à cette époque, entre la Mésopotamie et l’Egypte).
Mais tous ces bouleversements pouvaient-ils demeurer étrangers à l’Occident ? Difficile de savoir dans quelle mesure ils ont pu être informés. Quoi qu’il en soit, un concile fut convoqué à Clermont le 24 novembre 1095 par le pape Urbain II, un champenois ex-clunisien du nom de Eudes de Lagery. Pour faire simple, il a vivement invité les chrétiens à porter secours aux «frères» chrétiens orientaux. Aucun grand baron n’était alors présent. Ceux qui témoignèrent de l’enthousiasme crièrent «Dieu le veut». Renouvelant et faisant relayer son message dans tout le Sud Ouest de la France, son appel sera particulièrement suivi (certains prédicateurs mal intentionnés introduiront dans leurs prêches une note antijuive qui se traduira par des exactions à l’encontre des grands centres intellectuels de Rhénanie tels que Cologne, Spire, Wörms, Mayence…).
La «croisade des Gueux» (1096) menée par le prêtre Pierre L’Ermite, le chevalier Gautier Sans Avoir et d’autres barons allemands tels que Emich de Leningen, est défaite par les Hongrois puis massacrée par les Turcs avant même leur entrée en Palestine (bataille de Xerigordon en octobre 1096). Peu après, la croisade des barons se met en marche (1097). J’insiste sur la scission entre cette première armée de paysans guidée par des prédicateurs peu scrupuleux voire carrément antisémites et, dans un second temps, une armée «professionnelle» menée par des seigneurs de la guerre.
Du reste, ces derniers recueilleront les débris de ces premières bandes éprouvées par les combats, la maladie et peut-être les remords…
Qui commandait cette nouvelle armée ?
En 1097, après la difficile prise d’Antioche (qui avait été une épreuve ardue pour les Francs et la découverte des rapports avec les musulmans), Godefroy de Bouillon, duc de Lotharingie, avait plus ou moins pris la tête de l’expédition avec Raymond de Saint Gilles, le puissant comte de Toulouse. A leur côté se trouvait Tancrède et Bohémond, prince de Tarente (et futur prince d’Antioche), des seigneurs normands venus tenter leur chance en Orient.
Pour être bref, à cet instant, aucun baron n’avait manifesté son intention de prolonger son séjour en Terre Sainte hormis Raymond de Saint Gilles (et uniquement jusqu’aux fêtes de Pâques 1100).
Seulement voila, la ville de Jérusalem, objectif initial de l’expédition, était redevenue Fâtimide (=égyptienne) entre temps (enlevée aux Turcs par Guynemer de Boulogne). Or, les Fâtimides avaient aidé les croisés dans leurs précédentes chevauchées : bien mal leur en pris car les Occidentaux avaient une mémoire fort sélective. Après les désertions d’Antioche, les maladies, l’épuisement, on estime à 25 000 le nombre de soldat restants pour libérer Jérusalem (quelques centaines de chevaliers restaient en Syrie du Nord afin de pérenniser les conquêtes réalisées).
Sans rentrer dans les détails, la plupart des barons finirent par se joindre au siège de Jérusalem et ce en dépit de leur volonté propre (beaucoup souhaitaient en premier lieu se tailler une principauté dans ce nouvel «eldorado»). Dès le 13 juin 1099, un assaut vigoureux échoua faute d’un nombre suffisant d’échelles. Finalement, le 14 juillet, la ville fut prise. Le massacre fut à la hauteur de la résistance et l’acharnement : beaucoup de musulmans s’étaient réfugiés dans la mosquée Al-Aqsa : ils furent en grande partie massacrés. Les femmes furent bien souvent violées, les nouveaux nés défénestrés du haut de la Tour David, hommes et vieux impitoyablement tués…A noter que le massacre ne fut pas systématique : des lettres hébraïques retrouvées dans la Géniza du Caire rapportent qu’une partie des juifs de Jérusalem furent amenés sous escorte à Ascalon où leurs coreligionnaires d’Egypte les rachetèrent, eux et leurs livres. De même, Raymond III permit au gouverneur Fâtimide de la place, Iftikhâr, de pouvoir retourner en Egypte avec la suite de sa maison.
Passons les querelles entre temporelles et spirituelles afin de savoir qui aurait la main mise sur Jérusalem. En effet, la question ne fut pas de suite tranchée : Rome devait-elle nommer un légat Primat de Palestine ou au contraire, laisser les barons choisir un prétendant parmi leur pair ? Après une lutte âpre entre Daimbert (envoyé du pape) et Godefroy de Bouillon, ce dernier fut nommé «Avoué du Saint Sépulcre», signe de modestie afin d’éviter le titre de roi de Jérusalem.
Godefroy étant mort le 18 juillet 1100, Baudouin son frère (jusqu’alors comte d’Edesse), repris ses titres en substituant l’hypocrite intitulé d’Avoué par celui de Roi de Jérusalem sous le nom de Baudouin Ier : le royaume hiérosolymitain était né.
b. Les structures de l’état hiérosolymitain
Si les fondations du futur royaume se sont très vite enracinées, c’est avant tout parce que les seigneurs composant l’armature de cette expédition sont rapidement parvenus à transposer les principes de féodalité occidentale en plein désert. Mais aussi parce que ses «piliers» de la croisade s’étaient entourés d’un groupe d’hommes qui, pour la plupart, étaient traditionnellement les vassaux de leur famille et avaient ainsi soudé la noblesse autour de ce nouveau combat.
La suite chronologique des évenements, les petites armées privées accompagnant les hauts seigneurs francs, ont permis à nombre d’entre eux de s’octroyer de vastes territoires au nord de la Syrie ou en Palestine. Du reste, chacun connaîtra un destin à la mesure de son habileté politique car, comme nous le verrons, c’est par leur exacte capacité au compromis que les barons assureront leur survie et indépendance.
1. Les rois de Jérusalem
N’ayant eut aucun enfant, Godefroy laissait le futur royaume entre Daimbert (aidé par Tancrède), et son frère Baudouin. Finalement, Baudouin Ier était couronné roi à Bethléem par Daimbert lui-même, preuve de la victoire du temporel sur les successeurs de Saint Pierre (1100).
Le 2 avril 1118, Baudouin Ier meurt au retour d’un raid d’Egypte. Il est clair que son baronnage se divisa en deux clans : les uns réclamaient son frère Eustache, comte de Boulogne, les autres, son cousin Baudouin de Bourcq (qui lui avait succédé comme comte d’Edesse). Ces derniers, avec Jocelin de Courtenay à leur tête, l’emportèrent. Après avoir pris soin de régler la succession du royaume de son vivant, Baudouin II maria l’aînée de ses quatre filles, Mélisende, à un haut baron d’Occident, Foulques V. N’ayant pas d’héritier mâle, il lui promit également le royaume.
Baudouin II meurt en 1131. Conformément à sa promesse, Foulques lui succède. Seulement voilà, il n’est pas venu seul en Orient. Il a emmené avec lui une foule d’Angevins renouvelant ainsi le personnel du roi. Cela entraîne des mécontentements voire des révoltes. Toutefois, Mélisende peut prendre sa revanche en novembre 1143, à la mort de son mari.
La reine mère décide alors de se comporter comme telle et non comme régente en attendant la majorité de Baudouin III. Elle s’appuie alors sur son cousin, Manassé d’Hierges.
Après avoir fait exiler ce dernier puis partager le pouvoir avec sa mère, Baudouin III recourut aux armes contre celle-ci et constitua son propre parti. Manassé fut alors exilé.
A la mort de Baudouin III (10 février 1163), son frère Amaury, alors comte de Jaffa et d’Ascalon, lui succède. Il devient Amaury Ier. Après avoir eu deux enfants de sa femme Agnès de Courtenay, Amaury Ier dû se résigner à la répudier du fait de son inconsistance et sa frivolité. Il se remaria alors avec la nièce de l’empereur byzantin Manuel Ier Comnène à savoir, Marie Comnène. N’ayant eu d’enfant que de sa première femme (Sybille et Baudouin), Amaury pu transmettre, selon le droit coutumier franc, la couronne à son fils, Baudouin IV, le futur roi Lépreux dont le film relate en partie l’histoire. Couronné le 15 juillet 1174, cet avènement mettait sur le trône un adolescent n’ayant pas encore treize ans et déjà mûri par la douleur précoce de sa lèpre ainsi que le poids de sa futur charge. C’est au cours de son règne que se joua en grande partie le destin du royaume (1174-1185). La plupart des séquences du film se déroulent durant cette période.
Nous n’irons pas plus loin dans l’étude des rois de Jérusalem car ce sera, entre autre, l’objet de nos deux prochaines parties.
2. Le comté d’Edesse
Au début des croisades, le comté d’Edesse semblait être un apanage pour les futurs rois de Jérusalem. En effet, Baudouin Ier et Baudouin II ont tous deux échangé ce titre avec celui de roi de Jérusalem et ce, même si Tancrède a vainement tenté de récupérer le fief.
De ce fait, c’est finalement une famille originaire du Gâtinais, les Courtenay, qui prit possession du comté. Ce dernier eut une existence assez brève. En effet, après Jocelin Ier (1119-1131), Jocelin II fut chassé d’Edesse en 1144 et ne put se maintenir qu’au Sud Ouest du comté, à Turbessel.
Ce fut d’ailleurs une des raisons de la Deuxième croisade (1148). Il fut capturé par les Turcs (1149) et mourut dans les prisons d’Alep. En 1150, sa femme Béatrice se résigna à céder les «confettis» du comté aux byzantins.
Toutefois ses enfants, Agnès et Jocelin III poursuivirent leur carrière à la cour de Jérusalem, continuant à porter le titre de courtoisie de comte d’Edesse. Rappelons qu’Agnès épousa par la suite le roi Amaury Ier de Jérusalem.
3. La principauté d’Antioche
De par sa position, jouxtant le golfe d’Alexandrette, Antioche a toujours posé problème pour les croisés qui la défendait. En effet, la cité se trouvait au contact de puissants adversaires, entraînant de graves crises structurelles. Ainsi, Bohémond, devenu maître de la ville dès 1098, fut capturé par les Danishmendites durant l’été 1100. Après avoir prêté serment de rendre la ville à son cousin lors de sa libération, Tancrède exerça la régence. Trois ans plus tard, Bohémond est libéré contre rançon mais il meurt en Occident où il était parti chercher des renforts.
Jusqu’en 1112, Tancrède puis Roger de Salerne assurent la régence pour le compte de l’enfant Bohémond II mais Roger décède lors de la bataille de l’Ager Sanguinis (1119), Baudouin II doit alors prendre le gouvernement de la principauté jusqu’à la majorité de Bohémond II. Il en profite pour marier ce dernier avec sa fille Alix (1126).
Néanmoins, Bohémond II meurt dès 1130 et Alix doit demander l’aide du roi Foulques afin d’assurer la survie de la cité. Le roi fait alors épouser l’héritière de la principauté, Constance, au second fils du comte de Poitiers, Raymond (1136).
Lors du décès de Raymond au champ d’honneur (1149), Baudouin III prend la régence. Seulement voilà : Constance tombe éperdument amoureuse d’un chevalier de bonne extraction mais sans le sou, Renaud de Châtillon sur Loing. Elle décide de l’épouser en 1153. Déjà peu enclin à la réflexion à cette époque, Renaud se fait capturer en 1161. Pendant ce temps, son épouse intrigue avec le concours des byzantins afin de se maintenir au pouvoir. Elle va même jusqu’à négocier le mariage de sa fille Marie avec l’empereur Manuel Ier Comnène. Les barons d’Antioche imposent à la reine le titre princier pour son fils Bohémond III. Ainsi, à son retour de prison en 1176, Renaud de Châtillon a perdu tout droit sur Antioche : son beau-fils a récupérer la principauté. Par son second mariage, il deviendra seigneur d’Outre Jourdain, ce qui lui permettra de préparer des razzias et pillages jusque très près de La Mecque, mettant ainsi en péril les accords passés entre Saladin et Le Lépreux. Nous observerons par la suite ces évenements et leurs conséquences à la lumière de la mise en scène de Ridley Scott.
4. Le comté de Tripoli
Dès 1102, Raymond de Saint Gilles était maître de Tortose. Il se titrait comte de Tripoli alors qu’il mourut sans que la ville fut prise de son vivant (1105). Après sa mort et le départ de sa femme et son jeune fils Alphonse Jourdain pour Toulouse, les vassaux tripolitains prirent pour chef le cousin de Raymond, Guillaume Jourdain comte de Cerdagne. Mais Bertrand, fils aîné de Raymond vint revendiquer le comté. Baudouin Ier dû intervenir pour les accorder entre eux en convoquant une assemblée des barons.
Tancrède, décidément toujours dans les mauvais coups, renonça difficilement à Edesse et le comté de Tripoli fut partagé entre Guillaume Jourdain (devenu l’homme lige de Tancrède) et Bertrand (celui de Baudouin Ier).
Guillaume Jourdain fut tué peu de temps après dans des circonstances pour le moins suspectes. Quoi qu’il en soit, Bertrand pu alors occuper Tripoli et Tancrède finit par abandonner le nord du comté au fils de Bertrand, Pons (1112).
A la mort de Pons (1137), tué par les Damasquins, Raymond II lui succéda. Lors de la Deuxième croisade, il dût affronter les revendications du fils d’Alphonse Jourdain mais éluda le problème en passant une alliance avec Nûr al-Dîn.
Lorsque lui-même fut assassiné (1152), son fils Raymond III de Tripoli gouverna le comté jusqu’en 1187. Là encore, ce personnage essentiel dans le film sera longuement étudié dans les parties à venir.
Sources et bibliographies
Tout d’abord, il convient de rappeler que les sources sur l’histoire des croisades sont particulièrement diverses et en phase avec leur époque (1096-1291).
De ce fait, vous pourrez avoir accès à des chansons de geste, des contes (tradition orale) et par ailleurs, des lettres, des chroniques sans oublier des documents juridiques ou comptables.
Sur le fond, j’ai estimé que les sources narratives musulmanes, arabes, byzantines, chrétiennes syriaques, arméniennes et coptes étaient tout aussi essentielles que celles des croisés. En effet, les autochtones n’ont en général pas eu les mêmes raisons que les croisés de s’intéresser à ces expéditions venues de l’Ouest mais leurs «historiens» ont observé des évènements qui affectaient le quotidien de leurs régions et ethnies. Aussi, le recours aux sources indigènes est-il indispensable tant pour analyser les expéditions croisées que pour comprendre les conditions dans lesquelles elles se situaient. En conséquence, j’ai préféré utiliser majoritairement des ouvrages reconnus, usant de sources issues des différentes obédiences et communautés même pour une si courte période. Je procède ainsi de la même manière que les conseillers historiques de Ridley Scott qui ont jugé certaines sources peu ou proue fiables.
Ouvrages de référence
BALARD (Michel), Les croisades, Paris, 1988.
GROUSSET (René), Histoire des croisades et du royaume Franc de Jérusalem, Paris, 1934-1936, 3 volumes.
PLATELLE (Henri), Les croisades, Paris, 1994.
RICHARD (Jean), Histoire des croisades, Paris, 1994.
Sous la direction de SUBRENAT (Jean), croisades et pèlerinages : récits, chroniques et voyages en Terre sainte, Paris, 1997.
TOLAN (John), Les Sarrasins, Paris, 2003.
Etudes particulières
Sur les origines de la croisade
DELARUELLE (Etienne), L’idée de croisade au Moyen-Âge, Turin, 1980.
FLORI (Jean), Guerre sainte, jihad et croisade, Paris, 2002.
Sur l’histoire religieuse de l’Orient Latin et de l’Occident
CHELINI (Jean), Histoire religieuse de l’Occident médiéval, Paris, 1991.
RICHARD (Jean), La Papauté et les missions d’Orient au Moyen-Âge, Rome, 1977.
SCHWARZFUCHS (Simon), Les juifs au temps des croisades en Occident et en Terre sainte, Paris, 2005.
Sur les ordres militaires
DEMURGER (Alain), Vie et mort de l’ordre du Temple, Paris, 1985.
DEMURGER (Alain), Les templiers : une chevalerie au Moyen-âge, Paris, 2005.
FOREY (Alan), Ordres et Croisades, Aldershot, 1985 (trad.).
Biographie
AUBE (Pierre), Beaudouin IV de Jérusalem : le Roi Lépreux, Paris, 1981.
EDDE (Anne-Marie), Saladin, Paris, 2008.