APOTRES

Dans le rite de la messe, les douze apôtres sont nommés dans l'ordre suivant : Pierre, Paul, André, Jacques, Jean, Thomas, Jacques, Philippe, Barthélemy, Matthieu, Simon et Taddée. Cependant, dans l'iconographie chrétienne française du XIe au XVIe siècle, cet ordre est parfois modifié. Matthias, choisi comme apôtre en remplacement de Judas Iscariote (Actes des apôtres, chap. 1), remplace souvent Taddée. Parfois, Jacques le Mineur et Simon sont remplacés par les évangélistes Luc et Marc, et Paul est inclus parfois aux dépens d'un apôtre choisi directement par Jésus-Christ, comme Jude, par exemple.

les apotres

Les apôtres de l'ancienne abbaye de Mimizan, vers 1220 ( XIIIe siècle ).

Il était donc souvent complexe de désigner nominalement les douze apôtres dans la sculpture des XIe, XIIe et XIIIe siècles. Plus tard, les apôtres, portant les instruments de leur martyre ou divers attributs distinctifs, ont pu être identifiés individuellement. Cependant, dès le XIIIe siècle, dans la sculpture de nos cathédrales, certains, sinon tous les apôtres, étaient déjà identifiés par les objets qu'ils tenaient dans leurs mains. Saint Pierre portait généralement deux clés, saint Paul une épée, saint André une croix en sautoir, saint Jean parfois un calice, saint Thomas une équerre, saint Jacques une bourse garnie de coquilles et une épée ou un livre, saint Philippe une croix latine, saint Barthélemy un coutelas, saint Matthieu un livre ouvert. C'est seulement vers la fin du XIe siècle ou au début du XIIe siècle que l'on a commencé à représenter la figure de saint Pierre tenant les clés. Par exemple, le grand tympan de l'église de Vézelay, datant de cette époque, montre saint Pierre tenant deux grandes clés, à la porte du paradis et près du Christ. À la cathédrale de Chartres, portail méridional du XIIIe siècle, la plupart des apôtres tiennent des règles ou les instruments de leur martyre, ou les attributs mentionnés précédemment. Parfois, Paul, les évangélistes, Pierre, Jacques et Jude, tiennent des livres fermés, comme à la cathédrale de Reims. À Amiens, on voit une statue de saint Pierre tenant une seule clé et une croix latine en mémoire de son martyre.

Les apôtres étaient souvent accompagnés de petites figurines représentant les personnes qui les ont persécutés ou qui évoquent des aspects majeurs de leur vie. C'est particulièrement pendant les XIVe et XVe siècles que les apôtres ont été représentés avec des attributs pour faciliter leur identification, bien que cela ne soit pas systématique. Au portail méridional de la cathédrale d'Amiens, le linteau de la porte est orné de statues à mi-corps des douze apôtres. Ils sont représentés en train de discuter entre eux : certains tiennent des livres, d'autres des parchemins. Ce magnifique bas-relief, que nous présentons en deux parties, bien qu'il soit sculpté sur un linteau divisé seulement par le dais couronnant la sainte Vierge, date de la seconde moitié du XIIIe siècle. Dans l'enceinte de la clôture du chœur de la cathédrale d'Alby (début du XVIe siècle), les douze apôtres sont représentés en pierre peinte, chacun tenant une banderole sur laquelle est écrit un des articles du Credo. Au XIIIe siècle, Guillaume Durand (dans le Rationale div. offic.) affirme que les apôtres, avant de se disperser pour convertir les nations, ont composé le Credo, et chacun a apporté l'une des douze propositions du symbole. On trouve fréquemment, dans les édifices religieux du XIe au XVIe siècle, des légendes séparées pour quelques-uns des apôtres, souvent représentées dans les bas-reliefs et les vitraux racontant l'histoire de la sainte Vierge, comme à la cathédrale de Paris, à la belle porte de gauche de la façade et dans la rue du Cloître. À Semur en Auxois, dans le tympan de la porte nord (XIIIe siècle), on trouve la légende de saint Thomas, sculptée avec une rare finesse. Cette légende, ainsi que celle de saint Pierre, se retrouve fréquemment dans les vitraux de cette période.

christ en majeste entoure des apotres

Les apôtres d'une église romane dans la Nièvre, Eglise Saint-Julien de Mars sur Allier, Détail du tympan (iconographie tirée de l'Apocalypse de Jean), fin XIe ou début XIIe siècle.

En France, à partir du XIIe siècle, les types utilisés pour représenter chacun des douze apôtres sont restés relativement inchangés jusqu'au XVe siècle. Ainsi, saint Pierre est toujours représenté avec la barbe et les cheveux bouclés, le front bas, la face large, les épaules hautes et la taille basse ; saint Paul est chauve, avec une mèche de cheveux sur le front, un crâne élevé, des traits fins, une barbe longue et soyeuse, un corps délicat, des mains fines et longues ; saint Jean est imberbe, jeune, avec des cheveux bouclés et un visage doux. Au XVe et surtout au XVIe siècle, lorsque saint Pierre est représenté seul, il est souvent vêtu comme un pape, portant une tiare sur la tête et les clés à la main. Parmi les plus belles statues d'apôtres, il ne faut pas omettre celles qui sont adossées aux piliers intérieurs de la Sainte-Chapelle (XIIIe siècle), chacune portant une des croix de consécration. Ces figures en pierre sont d'un travail admirable, ornées de motifs peints et dorés imitant des étoffes luxueuses ornées de bordures incrustées de pierres précieuses. L'habitude de placer les apôtres contre les piliers des églises, en particulier dans les chœurs, était courante.

L'un des exemples les plus remarquables est le chœur de l'ancienne cathédrale de Carcassonne, du début du XIVe siècle. Les apôtres étaient également placés à l'avant des autels, sur les retables en pierre, en bois ou en métal. On les retrouvait sur les piliers des cloîtres, comme à Saint-Trophyme d'Arles, autour des chapiteaux de l'époque romane, sur les jubés en sculpture, et dans les bordures des tombes, notamment aux XIVe, XVe et XVIe siècles. À la cathédrale de Paris, comme à Chartres et à Amiens, les douze apôtres étaient disposés de part et d'autre du Christ, homme, dans les embrasures des portes principales. Plus anciennement, dans les bas-reliefs des XIe et XIIe siècles, comme à Vézelay, ils étaient assis dans le tympan de chaque côté du Christ triomphant.

À Vézelay, ils étaient au nombre de dix, disposés en deux groupes ; des rayons partaient des mains du Christ et se dirigeaient vers les têtes couronnées de dix apôtres, la plupart tenant des livres ouverts. Au portail royal de Chartres, le tympan de gauche représentait l'Ascension ; les apôtres étaient assis sur le linteau inférieur, tous regardant vers le Christ élevé au-dessus des nuages. Quatre anges descendaient du ciel vers les apôtres et occupaient le deuxième linteau. Dans toutes les sculptures et peintures du XIe au XVIe siècle, les apôtres étaient toujours représentés pieds nus, quelle que soit la richesse de leurs costumes ; ils n'étaient généralement coiffés que vers la fin du XVe siècle. L'exemple que nous avons cité précédemment, tiré du portail méridional d'Amiens (XIIIe siècle), montre l'un des apôtres, saint Jacques, avec un chapeau couvrant sa tête, ce qui était peut-être unique. En ce qui concerne les vêtements, ils étaient généralement composés d'une tunique longue à manches sans fente, d'une ceinture et d'un manteau rond, avec ou sans agrafes.

Ce n'est que vers la fin du XVe siècle que la tradition vestimentaire a commencé à changer, et l'on a vu apparaître des apôtres parfois vêtus de costumes évoquant les vêtements des docteurs de l'époque.


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