Villages de Selommes, son Eglise et son "Donjon"

 

 

 prieure selommes eglise tour donjon

Selommes est un petit village aux origines assez anciennes. Au centre du village se trouve l'ancienne église romane, dédiée à Notre-Dame, fortement remaniée de l'intérieur probablement au XVe siècle et ultérieurement, sa tour, probablement une ancienne tour de défense qui s'approche en terme de construction des anciens donjons carrés du XIe siècle. Le roi de France, Louis XI, vint régulièrement à Selommes, probablement au Château de Pointfonds ( anciennement Puyfonds ) situé un peu plus loin du village en contrebas. Au nord de l'église se trouvait le prieuré qui appartenait à Bourg-Moyen, aujourd'hui il parait difficile d'imaginer l'importance du prieuré. Au Moyen-Âge la fontaine de Saint-Bouchard était réputée pour guérir de la fièvre, ce qui faisait venir de nombreux pélerins.

Selommes, vers 1959, est désignée par un collaborateur de Jean Monnet, père de l'Europe actuelle, comme lieu possible d'une nouvelle capitale Européenne.


 

 

Historique & Histoire 

 

 

donjon selommes

La tour de Selommes, transformé en sacristie et clocher, pourrait avoir eu comme fonction celle d'une tour de défense. Néanmoins il est assez difficile d'en connaître son usage initial aujourd'hui,. Un souterrain, directement dans la masse de terre, rejoint le cellier d'une belle qualité qui a pu être une ancienne crypte. Il est fort probable que la tour et le cellier ont connu des usages très différents et qu'ils furent modifiés régulièrement pour l'adapter à un nouvel usage. L'église romane a été fortement remaniée au XVe siècle, perdant ses voûtes et colonnes (?) romanes, sans qu'on en sache pourquoi; Même si une destruction, comme à Fréteval, par les anglais n'est pas à exclure, puisque manifestement les modifications sont ultérieures à 1430, probablement mi-XVe à fin XVe.

Origines

Il existe beaucoup de zones d’ombres sur ce village, sur son histoire locale et sa tour qui fut transformée en clocher paroissiale.  Solom fut érigée en capitale d'une condita, c'est-à-dire d'un territoire qui peut être égalé à nos cantons actuels et fit partie d'un pagus qui est représenté maintenant par nos arrondissements et qui fut celui de Vendôme. Une condita est une désignation de circonscription territoriale qui apparaît au VII e siècle et est en usage durant la période carolingienne.

Si la présence humaine est attestée lors de la l’époque Gallo-Romaine, à l’époque le village avait le nom de Solom, l’Histoire du Vendômois par M. de Pétigny, p. 83: « Les faiseurs d'étymologie ont prétendu que Selommes tirait son nom d'un siège que les habitants auraient soutenu contre César et où ils auraient été tous exterminés à l'exception d'un seul homme. Il est possible, en effet, que la ville gauloise qui existait sur l'emplacement de Selommes ait été détruite comme beaucoup d'autres, dans la lutte acharnée que les Carnutes soutinrent contre le conquérant romain ; mais les Celtes ne parlaient pas assez bien le français à cette époque pour qu'on puisse leur attribuer le jeu de mots qu'on a donné pour étymologie ».

Il est possible qu’il y ait eu une villa romaine dans le village actuel de Selommes, et précédemment des habitations gauloises, néanmoins cette affirmation n’est pas étayée par des éléments probants. Il faut cependant rajouter que dans les « terres noires » de Selommes, près de Villarceau en contrebas du village, il fut découvert des soubassements de constructions manifestement d’origine romaine «  Sur une longueur de cent mètres environ, de l'est à l'ouest, on voyait apparaître la base de deux murs dont les débris couvraient une partie de l'enceinte d'un édifice qui avait, au midi, sa face principale. Il était divisé en plusieurs pièces par des murs de refend dont on voyait quelques pans au-dessus des fondations. Une couche régulière de béton*[i], sur un fond do cailloux et recouverte d'un enduit de ciment, formait le pavé de ces salles basses. Les débris, qui en couvraient l’intérieur, étaient un composé de moellons durs de petit appareil, de nombreux morceaux de tuiles à rebord et convexes, de fragments de poteries variées dont aucune n'a été retrouvée intacte. Parmi ces poteries, généralement grossières, on en rencontra cependant quelques-unes d'un grain plus fin et couvertes d'un enduit rouge bien conservé

L’édifice fut probablement détruit et les habitants massacrés :

« L'édifice en question mesurait dix mètres de large, nous disent d'autres visiteurs : « A cinquante mètres, reprend notre cicerone de Lubidé, en face et au midi, d'autres fondations de dimensions moins grandes indiquaient une construction secondaire. La cour qui les séparait était alors totalement encombrée. En continuant de déblayer, on vit apparaître une grande quantité d'ossements et l'on put, à la fin des travaux, constater d'une manière à peu près certaine la présence de quatre-vingts squelettes humains, ayant appartenu à des personnes de tout âge et de tout sexe, couchés et renversés dans tous les sens. Les différentes salles, qui les renfermaient, formaient la moitié du bâtiment principal. Dans les constructions accessoires, on a retrouvé également des ossements nombreux d'animaux domestiques, disséminés par chaque espèce de bétail dans des loges séparées. Une loge semblable, située à l'ouest du grand bâtiment, renfermait une grande quantité de bois de cerfs et d'ossements de ces animaux, entretenus sans doute autrefois dans cette enceinte pour l'agrément du propriétaire. Les bâtiments servant au logement des serviteurs étaient situés à l'est du corps de logis principal ; nous n'avons rencontré aucun vestige d'ossements sous leurs décombres. On pourrait en conclure qu'au moment de la catastrophe un danger commun avait réuni esclaves et maîtres, ce qui explique la grande quantité de cadavres retrouvés ensemble. »

Au XIXe siècle un habitant de Selommes trouva une pièce romaine datée de Tibère (latin : Tiberius Cæsar Divi Augusti Filius Augustus), né à Rome le 16 novembre 42 av. J.-C. et mort à Misène le 16 mars 37 ap. J.-C., est le deuxième empereur romain de 14 à 37. Il appartient à la dynastie Julio-Claudienne. Cette pièce en or, acheté par le musée de Vendôme, portait dans un état parfait de conservation l'inscription suivante : « TI (BER) CAESAR DIVI AUGUSTINI F(ILIUS) AUGUSTUS « , « Tibère César Auguste, fils du divin Auguste». La tête de l'empereur est couronnée de laurier. Sur l'avers figure une personne assise tenant un sceptre et une fleur avec l'inscription « PONT, MAX. », qui veut dire que le monarque était en même temps Souverain Pontife, joignant, pour consolider son pouvoir, le pouvoir religieux au pouvoir civil.

Trouver une pièce romaine n’est pas rare, mais en or c’est déjà un cas moins fréquent.

1105, sur la colline où baigne la Houzée, à côté du cimetière mérovingien, se trouvait une église à l’ouest de la Saint-Bouchard ; c’est l’église actuelle. Il est probable qu’elle remplace une plus ancienne.

1154, une bulle du pape Athanase fait référence à une Sainte-Marie de Selommes qui était une dépendance de Bourg-Moyen et que c'était le supérieur de cette communauté qui avait le droit d'en choisir le curé. Selon Abbé P. Brisset, cette règle avait changé en 1122 sur les chanoines séculiers,

« Déjà, en 1105, sur la colline que baigne la Houzée, tout près du cimetière mérovingien, à l'ouest de la fontaine Saint-Bouchard et jusqu'à l'est de celle de Saint-Leufroy, s'élevait une église. On pouvait presque en cette année fêter son centenaire. C'est qu'après l'an 1000, alors qu'on ne redoutait plus la fin du monde comme imminente, on s'était empressé de construire des temples au Seigneur ou de reconstruire ceux qui avaient été détruits par les Normands. Pour nous, l'église actuelle dont l'architecture accuse le XIe siècle ne devait pas être la première qu'on édifiait en ce lieu. Elle devait en remplacer une autre qu'on avait trouvée en ruines ou qu'on jugeait insuffisante pour les besoins du culte. M. le comte de Saint-Venant, dans son dictionnaire, insinue que le pignon Est présente des restes de l'époque mérovingienne. Non, Selommes telle que nous la connaissons ne devait pas être privée d'un sanctuaire chrétien, et j'ose dire que ce furent des curés catholiques qui enterrèrent les morts qui reposent au cimetière mérovingien. D'où venaient ces prêtres ? Nous savons par une bulle du pape Athanase datée de 1154 que Sainte-Marie de Selommes était une dépendance de Bourg-Moyen et que c'était le supérieur de cette communauté qui avait le droit d'en choisir le curé. Sans doute, comme je vous le dirai plus tard, il y eut une transformation dans la règle en 1122, mais cette nouvelle discipline s'exerça sur les chanoines séculiers, et ce sont eux que je veux voir déjà depuis près de deux siècles, venant de Blois en notre condita vendômoise pour déverser sur nos ancêtres les bénédictions et les pardons divins. »

La tour fut pendant un temps attribué aux romains, mais les contreforts sont plutôt du XIIe, voir XIe, que l’on retrouvait aisément sur les constructions normandes, les premiers donjons carrés ainsi que certaines églises romanes du XIIe. Les constructions romaines étaient généralement exemptes de ce type de contrefort, bien sûr on pourrait toujours arguer que les contreforts sont ultérieurs à la construction de la tour, mais si c’est probablement le cas pour le contrefort massif en bas à gauche, ce n’est pas le cas pour les autres qui sont contemporains à la tour.

Il ne semble pas que la tour ait un système défensif, pas d’ouverture comme une meurtrière mais des ouvertures romanes sur la façade principale et rectangulaire sur les façades latérales. Si la tour ne garde pas d’aspect défensif, il ne faut pas exclure une volonté défensive, de protection et d’usage comme tour de guet, voir tour de « trésor » afin d’y garder les objets liturgiques les plus précieux.

Un grand nombre de lettres au parlement de Paris, qui sont actuellement conservées dans les Archives nationales, furent précisément datées leur réception, sauf leurs copies : « Donne a Selommes, le VIe jour de mars. A noz amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre court de Parlement. Recepte ix marcii M° CCCC° LXXVII° (avant Pâques) » (Archives nationales X 1A 9317, fol.79 ; tome VI p. 339). (wiki)

Le roi expédia à Selommes une lettre au chancelier le 4 septembre : « Monsr le chancellier, mon amy, je vous envoye les lettres de mariage de monseigneur de Beaujeu, afin que les voyez, et si elles sont bien, mandes le moy, et je les expedieray ;… » Joseph Vaesen, Lettres de Louis XI tome X p. 349, Librairie Renouard, Paris 1908.

Les seigneuries de Villeluysant et de Chissay dépendaient de la paroisse de Selommes, au XVIe le quart de la dîme appartenait à Saint-Georges de Vendôme.

1375,  la seigneurie de Montault, appartient à Geoffroy de Vendôme, écuyer, puis en 1438 à Pierre de Tibivilliers puis en 1484 à Jean de la même famille. Puis Montault est réuni à Pointfond, elle appartenait alors à la famille de Bucy. Le lieu dit Les Effets appartenaient d'abord au comte de La Forêt, puis au Bégon. Le petit-preuilly a appartenu à la famille des Harcourt, puis à Crignon-Bonvallet. (2)

Epoque Récente

 

Aujourd’hui une partie de la tour est utilisée pour un usage religieux, sacristie. Aucune cheminée, aucun confort. Néanmoins la tour fut probablement plus grande et devait arriver au moins jusqu’au cœur de l'actuelle église romane.

On retrouve à Loudun ce type d’usage de tour de guet à usage militaire limité, édifiée vers 1040, sans cheminée, ni système de défense évoluée. Néanmoins à Loudun on est sur un usage purement militaire, une tour assez haute et plus massive, alors qu’à Selommes on est probablement un usage civil et religieux comme le montre la frise à colonnette sur l’une des faces de la tour. On peut faire remarquer la tour de Coulommiers-la-Tour, à quelques km, ne fut guère utilisée, sur ce qu'on sait aujourd'hui soit pas grand chose, mais on sait au moins que Selommes prélevait la dîme sur Coulommiers.

La présence d’un cellier, avec souterrains reliant à la tour, dénote cependant une volonté de s’échapper de la tour et d'avoir des accès cachés. Un cellier qui aurait eu plusieurs fonctions selon les époques, mais dont l’usage principal est à déterminer et son ancienneté. Il faut remarquer qu'un cellier souterrain, en plein milieu de la cour, dans un système non défensif n'est pas très fréquent, surtout qu'il est d'une taille tout à fait correct. Le cellier pourrait avoir comme fonction initiale l'usage d'une crypte ou ossuaire puisque il existait un cimetière à cet emplacement, des éléments de sarcophage on été retrouvés.





Eglise Notre-Dame

eglise de selommes

Le chevet carré, dit plat ou quadrangulaire, est assez ancien, probablement du XIe, voir antérieur car les chevets carrés sont courants au IXe et au Xe, la façade fut reprise au XIIe et XVe et des fenêtres gothique rajoutées. En général les églises anciennes à chevet plat ont une ouverture sur les côtés, ce n'est plus le cas ici aujourd'hui, néanmoins on remarque dans la cour du prieuré les vestiges d'une ancienne porte romane.

 

 

Description église de Selommes ( page 19 )

Tout d'abord un pignon de 9 m. 60 de large se dresse devant nous, faisant face au soleil couchant, car l'église, comme toutes celles de cette époque, est orientée. Nous pouvons l’admirer ; il n'est pas sans valeur. Au milieu nous y voyons un avant-corps contenant la porte d'entrée avec colonnes à chapiteaux et archivolte en retrait.

Une corniche saillante repose au-dessus sur des modillons frustement sculptés et une fenêtre romane surmonte le tout.

Le prieur nous fait remarquer que la porte rappelle légèrement le style mauresque, c'est-à-dire que son cintre s'élargit quelque peu après sa naissance, comme le ferait un cercle qu'on aurait coupé un peu au-dessous de son diamètre. Deux contreforts ordinaires maintiennent ce pignon aux deux extrémités. On nous fait remarquer maintenant que le vaisseau est formé de deux rectangles qui sont et la nef et le chœur. Ce qui les différencie à l'extérieur, c'est la différence de largeur. La première mesure 18 m. 80 de long sur 9 m. 60 de large. Le chœur ne mesure que 12 m. de long sur 7 m. de large. Ce qui fait une différence de 2 m. 60, ou 8 pieds environ comme dit le bon curé. 

 modillons art roman eglise de selommes

Modillons, oeuvre caractéristique de l'art roman sur les églises.

 facade decoree eglise romane modillons

La façade romane du chevet exprime une volonté manifeste d'en faire un édifice de grande qualité de construction. L'opus spicatum,  en bas, largement utilisé avant et jusqu'à la fin du XIe, puis progressivement abandonné, elle doit son origine aux constructions romaines. On peut observer la qualité artistique et le type de construction qui diffères totalement des autres façades de l'église construite, principalement, en petite pierres. On remarquera que les contreforts ne sont pas d'origines et furent probablement rajoutés ultérieurement. Il est quasiment certain que la  fenêtre romane soit un rajout ultérieur afin d'y mettre la lumière, en effet on remarque les trous de boulin qui induit clairement qu'il existait des étages sur cette partie ( au moins deux ), le mur est donc un réemplois d'une ancienne construction qui se prolongeait dans la rue. Il n'est pas inenvisageable d'y voir les vestiges d'un ancien Aula carolingiens du IXe ou d'un ancien bâtiment religieux, en tout cas il ne s'agissait pas d'un bâtiment à usage de guerre. La qualité visuelle explique probablement la volonté pour les nouveaux commanditaires de garder cette façade. On peut donc penser que cette façade est largement antérieure à la construction de l'église romane du XIe.

Cela explique aussi la frise à colonnette sur le contrefort du "donjon" qui avait une utilité visuelle à l'époque mais dans quel contexte ? impossible d'y répondre, mais on peut dire sans risque qu'il ne s'agit pas d'une erreur de construction mais d'un changement d'usage.

 frise colonette roman

 

 

 escalier cellier souterrains

Escalier du Cellier donnant accès aux souterrains ( qui sont creusé mais non maçonné )

 

porte prieure

Remarquons la porte du prieuré, probablement du XIIIe siècle. On observe la porte piéton sur la droite, la grande porte ne devait s'ouvrir que lors du passage de charrettes.

 

nef eglise selommes poutre

Nef de l'église de Selommes, au fond le cœur avec le magnifique retable représentant l’Assomption de la Vierge orne le mur du chevet. Inscrit à l’inventaire des monuments historiques depuis 1974, ce retable majeur date du XVIIIème siècle. Il a été restauré en 2012. On peut voir sur la droite les fenêtre gothique et sur la gauche les fenêtres romanes. A l'intérieur il n'y a quasiment plus aucun vestige de l'époque romane, il fut mis des poutres transversales afin d'alléger l'ensemble et  une voûte en coque de bateau renversé.

 

[i] Rappelons que le béton est une invention romaine même si elle diffère aujourd’hui beaucoup de l’époque romaine. - Wiki = Wikipédia -

 

 

 

 

sources : L'HISTOIRE de SELOMMES Par l'Abbé P. Brisset - (2) Le Vendômois : épigraphie et iconographie / par le marquis de Rochambeau

 

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